SOURCE : 2ème civ, 23 janvier 2014, Arrêt n°72 F-P + B (n° V 13-12.053).
Les professionnels du droit et du chiffre se retrouvent fréquemment confrontés à la situation où un gérant majoritaire d’une société nouvellement créée se heurte au Régime Social des Indépendants (RSI) qui adresse aux intéressés des appels de cotisations dès l’immatriculation de la société auprès du Registre du Commerce et des Sociétés.
Or, dans la cas relativement fréquent où une société est immatriculée avec la mention « sans activité », notamment lorsque, par exemple, elle est constitué en vue de l’acquisition d’un fonds de commerce qui se réalise avec un décalage de quelques semaines, voire quelques mois, la société se retrouve très souvent contrainte d’acquitter des cotisations alors qu’elle n’a aucune activité économique susceptible de générer de la trésorerie afin d’en assurer le règlement. La société se retrouve dès lors dans une situation délicate, le régime social des indépendants n’hésitant pas à délivrer des contraintes afin d’obtenir le paiement desdites cotisations.
Fort opportunément, la Cour de Cassation vient de prendre position sur cette question par l’Arrêt précité du 23 janvier 2014.
Au cas d’espèce, il s’agissait d’une activité constituée sous forme d’EURL, pour laquelle l’associé gérant, étant précédemment au chômage, avait bénéficié du régime d’exonération des cotisations sociales accordé aux chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprise.
Afin de déterminer la date d’échéance de cette exonération et donc de fixer la date à partir de laquelle l’entreprise devrait effectivement régler les cotisations, le RSI avait retenu la date d’immatriculation de la société auprès du Registre du Commerce et des Sociétés.
Devant l’opposition du gérant majoritaire qui prétendait que l’activité de la société avait démarré postérieurement à son immatriculation au registre du commerce et des sociétés, le RSI délivrait une contrainte à laquelle le dirigeant fit opposition, de sorte que l’affaire se retrouva jugée par le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale de PARIS.
Par un Jugement en date du 02 février 2012, le TASS de PARIS va pourtant valider la contrainte en retenant que la date d’affiliation au régime d’assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales du gérant d’une société dépend de l’existence juridique de cette société et non de l’exercice d’une activité par celle-ci.
En l’espèce, le Kbis de la société faisant apparaître une date d’affiliation au Registre du Commerce et des Sociétés à compter du 16 mai 2006 et selon les informations transmises par la Chambre de Commerce, une date de création était fixée au 12 juin 2006, de sorte que le TASS de PARIS retient que c’est la date du 16 mai 2006 qu’il convenait de retenir à juste titre pour l’affiliation du gérant majoritaire ayant bénéficié de l’exonération de charges pendant 12 mois.
Toutefois, l’Arrêt précité de la Haute Cour ne va pas suivre le Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale dans son raisonnement.
Considérant, au contraire, qu’en statuant ainsi alors que la personne qui exerce une activité commerciale est tenue de verser la cotisation du régime auquel elle est affiliée, non à compter de son inscription au Registre du Commerce et des Sociétés, mais à compter du début de l’exercice de sa profession, le Tribunal a violé les articles L 633-10 et D 633-1 du Code de la Sécurité Sociale, étant précisé que le second de ces textes dispose que la cotisation est due à compter de la date à laquelle a débuté l’activité professionnelle entraînant l’assujettissement au régime d’assurance vieillesse des professions artisanales ou à celui des professions industrielles et commerciales.
En d’autres termes, le RSI ne peut exiger de la part d’un dirigeant majoritaire des cotisations qu’à compter du démarrage de l’activité de la société.
Christine MARTIN
Associée
Vivaldi-Avocats