SOURCE : 1ère civ, 28 nov. 2012. Pourvoi n° C 11-26.508. Arrêt n° 1374 P+B + I
L’article L.137-2 du Code de la Consommation dispose que l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.
La question que la Cour de Cassation a été amenée à trancher était de savoir si ce court délai de 2 ans était applicable à la créance de l’organisme de crédit contre l’emprunteur défaillant dans son obligation de rembourser le crédit immobilier contracté.
En répondant par l’affirmative, la Cour de Cassation évince le délai quinquennal désormais de droit commun de l’article L.110-4 du Code de Commerce qui dispose que les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
En l’espèce, un particulier souscrit deux emprunts auprès d’une banque suivant acte authentique du 27 mai 2003.
A la suite d’impayés, la banque a prononcé la déchéance du terme le 10 février 2006, puis le 12 juillet 2010, la banque lui a fait délivrer un commandement de payer aux fins de saisie immobilière.
La Cour d’Appel de REIMS dans son arrêt en date du 11 octobre 2011, déboute l’emprunteur de sa demande tendant à voir constater la prescription de la créance de la banque, en application de l’article L.137-2 du Code de la Consommation, et de juger en conséquence nul le commandement de payer valant saisie.
Pour justifier du débouté de l’emprunteur, la Cour d’Appel soutient que la durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance, sans égard pour la forme en laquelle elle est passée.
Elle considère donc :
1.- L’acte authentique date de 2003, l’article L.110-4 du Code de Commerce dans sa version antérieure à la loi du 17 juin 2008 dispose que « les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants se prescrivent par 10 ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes».
Ce même article dans sa rédaction actuelle prévoit que cette prescription est dorénavant de 5 ans et que la loi du 17 juin 2008 relative à la mise en place des nouvelles règles de prescription précise que les dispositions de ladite loi qui réduisent la durée de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi, sans que sa durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
2.- L’article L.137-2 du Code de la Consommation ne concerne pas les crédits immobiliers. Pour motiver son argumentation, la Cour d’Appel se réfère à la réponse ministérielle publiée le 21 avril 2009, laquelle prend soin de préciser « sous réserve de l’appréciation souveraine des juridictions ».
La Cour d’Appel d’en déduire que tout indique qu’il n’était pas question dans l’esprit du législateur de prévoir un délai de 2 ans pour les crédits immobiliers qui ne sont pas visés comme étant un service moderne qu’il faudrait prendre en considération comme une nouveauté économique.
Statuant sur le pourvoi formé par l’emprunteur, la Cour de Cassation casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt de la Cour d’Appel de DOUAI.
Voici ce qu’il est jugé :
« Qu’en statuant ainsi, quand les crédits immobiliers consentis aux consommateurs par des organismes de crédit constituent des services financiers fournis par des professionnels, la Cour d’Appel a violé le texte susvisé ».
Au travers de cet arrêt, la Cour de Cassation considère qu’en application de l’article L.137-2 du Code de la Consommation, l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par 2 ans.
Cette solution permet l’harmonisation des délais dans lesquels le prêteur professionnel, qui accorde un crédit immobilier ou à la consommation, est tenu d’agir en paiement en cas de défaillance de l’emprunteur.
En effet, l’article L.311-52 du Code de la Consommation applicable en matière de crédit à la consommation, impose lui aussi un délai de 2 ans.
Ce faisant, ce délai biennal ne s’applique pas à l’action de l’emprunteur d’un crédit immobilier ou à la consommation et c’est bien le droit commun quinquennal qui s’applique.
Geneviève FERRETTI
Vivaldi-Avocats