Source : Cass.com., 17 octobre 2018, n° 17-21857 P + B + I
I – Le cas d’espèce.
Une banque consent un crédit en date du 8 juin 2007 et prend en garantie du crédit consenti à la société le cautionnement d’une personne physique.
De manière désormais classique dans les arrêts donnant lieu à publication, la société est mise en liquidation judiciaire, la garantie actionnée.
Sans surprise, la caution oppose la disproportion de la garantie, mais sera rejetée tant en première instance qu’en appel.
Un pourvoi est alors formé par le garant qui argue que l’acte de prêt prévoyait en son corps que la Banque ne pouvait poursuivre le remboursement de sa créance sur la résidence principale de la caution. En tout état de cause, la maison ne pouvait donc rentrer dans le périmètre de l’actif de la caution ce qui crée la disproportion.
II – L’appréciation du patrimoine.
Les juges du quai de l’horloge rejettent le pourvoi au motif essentiel que le patrimoine de la caution n’est pas affecté par les stipulations de la garantie OSEO (exclusion de la résidence principale du patrimoine appréhendable par la Banque).
La Cour rappelle un arrêt précédemment publié qui avait émis une distinction fondamentale, à savoir l’assiette des biens faisant l’objet de l’appréciation de la proportionnalité du cautionnement de ceux offerts en gage aux créanciers.[1]
III – L’appréciation de l’endettement.
La Cour cassera partiellement l’arrêt querellé en lui reprochant de ne pas avoir pris en compte un autre engagement de caution.
Autrement dit, l’appréciation de la capacité de la caution à faire face à son engagement doit prendre en compte les engagements souscrits par la Caution.
Cet arrêt fait avancer la jurisprudence puisque la chambre commerciale refusait jusque là la prise en compte l’endettement global de la caution lors de sa mise en jeu si elle était en mesure de s’acquitter de l’obligation.[2]
En résumé, la Cour de cassation affirme que la consistance du patrimoine de la caution à prendre en considération pour l’appréciation de sa capacité à faire face à son engagement au moment où elle est appelée n’est pas modifiée par les stipulations de la garantie de la société Oséo (Bpifrance), qui interdisent au créancier le recours à certaines procédures d’exécution forcée.
Elle énonce par la suite que la capacité de la caution à faire face à son obligation au moment où elle est appelée s’apprécie en considération de son endettement global, y compris celui résultant d’autres engagements de caution.
Bien évidemment, si cet arrêt peut conduire à la paralysie du cautionnement, encore faut-il que le débiteur démontre la disproportion au jour de sa conclusion. Cela passe nécessairement par la déclaration des engagements sur la fiche patrimoniale et d’une disproportion manifeste.[3]
Jacques-Eric MARTINOT
Vivaldi Avocats
[1] Cass. com., 15 nov. 2017, n° 16-10.504, n° 1369 P + B + I
[2] Cass. com., 27 mai 2014, n° 13-15.038
[3] Cass.com., 28 février 2018, n° 16-24841 F-P+B+I