Source : Cass. civ. 3ème, 7 avr. 2016, n°14-24164 et n°14-25446
I – Les faits de l’espèce
Des particuliers ont acquis un appartement en Vente en l’Etat Futur d’Achèvement (VEFA), à l’aide d’un prêt bancaire, garanti notamment par une hypothèque conventionnelle. Incapables de louer le bien une fois construit, malgré les promesses des plaquettes publicitaires, les investisseurs ont demandé l’annulation de la vente, mais aussi du contrat de prêt.
Les juges du fond ont annulé la vente sur le fondement du dol, et par ricochet, ont annulé le contrat de prêt, accessoire au contrat de vente. Ils ont également rejeté la demande de la banque tendant à maintenir l’hypothèque conventionnelle en attendant les restitutions consécutives à l’annulation de la vente, au motif que celle-ci étant annulée, le bien n’était plus la propriété des investisseurs.
La banque a formé un pourvoi en cassation.
II – L’arrêt de cassation
La Cour régulatrice n’est pas de l’avis des juges du fond, et estime que l’obligation de restituer inhérente à un contrat de prêt annulé perdure, tant que les parties n’ont pas été remises en l’état antérieur à la conclusion de leur convention annulée. En conséquence, l’hypothèque conventionnelle consentie en garantie du prêt subsiste jusqu’à l’extinction de cette obligation.
III – La portée de la décision
La Haute juridiction rappelle par cette décision un principe fondamental de la théorie du groupe de contrats (et plus précisément des ensembles contractuels), qu’elle a déjà appliqué à des cautions d’une convention de distribution de carburants et de lubrifiants annulée après plusieurs années d’exécution (les restitutions nécessitaientd’établirles comptes entre le fournisseur et le distributeur)[1], ou d’un contrat de prêt différé destiné à l’achat d’actions d’une société commerciale[2].
Ce principe a été repris par le législateur, en matière de crédit immobilier, dans le Code de la consommation.
La rétroactivité de l’annulation d’un contrat est dotée d’un large effet par la jurisprudence, et est amenée à rayonner bien au-delà de l’acte anéanti, dès lors que les opérations sont intimement attachées (feue théorie de la cause !).
Dans une autre espèce, la Cour de cassation a jugé récemment que l’annulation d’un contrat de prêt, conséquence de l’annulation d’un contrat de vente d’immeuble, peut être indemnisée sur le fondement de la perte de gain de la banque, via les intérêts conventionnels qu’elle espérait encaisser, au titre de la perte de chance[3].
Les conséquences juridiques, en cascade, de l’annulation d’un contrat de vente sur les contrats accessoires (prêt, assurance etc.) se précisent un peu plus, et ce à la faveur des établissements de crédit.
Thomas LAILLER
Vivaldi-Avocats
[1] Cass. com., 12 févr. 1991, n° 89-10.882
[2] Cass. com., 2 nov. 1994, n°92-14.487
[3] Lire notre article Chronos sur la question : « Annulation d’un contrat de prêt accessoire au contrat de vente d’immeuble : quelle indemnisation pour la banque ? »