SOURCE : Cour de cassation, chambre commerciale, 8 novembre 2016, pourvoi n°15-12229
Afin de trouver un équilibre entre le droit des marques et le principe de la libre circulation des marchandises dans l’Espace économique européen, la directive 89/104 du 21 décembre 1988 a consacré la théorie de l’épuisement du droit de marque, lequel a été transposé à l’article L.713-4 alinéa 1 du Code de la propriété intellectuelle, comme suit :
« Le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis dans le commerce dans la Communauté économique européenne ou dans l’Espace économique européen sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement ».
Ainsi, le titulaire d’une marque ayant mis un produit marqué dans le commerce au sein de l’Espace économique européen ne peut plus s’opposer ultérieurement à la revente et à la libre circulation de celui-ci dans ce même espace, sauf exceptions légales.
La société Converse est titulaire d’une famille de marques « All Star » pour désigner des articles chaussants, lesquels sont distribués en France par un licencié et distributeur exclusif, la société Royer sport.
Après avoir fait procéder à une saisie contrefaçon de paires de chaussures revêtues de ces marques dans un magasin exploité par la société Sosnydis, les sociétés Converse et Royer sport l’ont assigné en contrefaçon et concurrence déloyale.
Comme moyen de défense, la société Sosnydis et ses fournisseurs, intervenants à la cause, ont invoqué l’épuisement des droits de la société Converse sur les marques susvisées pour les produits en cause.
Devant la Cour de cassation, le débat s’est porté sur la charge de la preuve d’un tel épuisement des droits.
Dans la lignée de l’arrêt « Van Doren » de la Cour de justice de l’Union européenne, la Haute juridiction a entendu assoir le principe d’une présomption d’épuisement du droit de marque résultant d’un risque réel de cloisonnement des marchés.
Seulement, le demandeur au pourvoi entendait rappeler qu’en tout état de cause, il revenait à celui qui se prévaut d’une telle présomption d’établir que les produits en cause sont authentiques.
La Cour de cassation ne suit pas ce raisonnement et rejette donc le pourvoi, en considérant que :
« l’épuisement des droits conférés par la marque supposant la mise en circulation des produits en cause pour la première fois sur le territoire de l’Espace économique européen par le titulaire de la marque, ou avec son consentement, ce qui en garantit l’origine, le tiers poursuivi n’a pas d’autre preuve à rapporter que celle de l’épuisement des droits qu’il invoque comme moyen de défense, sauf à démontrer, pour échapper à cette preuve, l’existence d’un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux ».
Ainsi, la charge pèse sur le titulaire de la marque, en tant que demandeur à l’action en contrefaçon, de rapporter au préalable, en se plaçant notamment sur le terrain de la fabrication, la preuve de l’absence d’authenticité des produits litigieux.
Virginie PERDRIEUX
Vivaldi-Avocats