Acte authentique et mentions manuscrites : ce n’est pas automatique !

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

 

Source : Cass. com., 14 juin 2017, n°12-11.644, F-P+B+I

 

Réponses de la Cour de cassation : oui pour la première question, non pour la seconde.

 

I – Les faits

 

Une société a effectué plusieurs prestations au profit d’une autre société, dont elle est restée impayée. Elle a par conséquent assigné en référé la débitrice, en paiement d’une provision. Un accord a été conclu entre les parties, puis homologué par ordonnance du juge des référés. A défaut de paiement, la société créancière a assigné la gérante de la société débitrice en sa qualité de caution, en exécution de l’accord homologué. Cette dernière s’est opposée à cette demande en soutenant que la créancière ne produisait aucun acte de cautionnement valable, notamment au regard des mentions manuscrites obligatoires imposées par le Code de la consommation. Les juges du fonds n’ont pas suivi son argumentation, et l’ont condamnée en paiement. L’affaire a été portée devant la Cour de cassation.

 

II – L’arrêt de rejet

 

La Chambre commerciale de la Haute juridiction relève que l’ordonnance de référé homologuant l’accord comporte mention de l’engagement du gérant de fournir une garantie personnelle, ce dont il résulte que son engagement, en qualité de caution solidaire, recueilli dans une décision judiciaire, est constaté dans un acte authentique, lequel ne répond pas des dispositions des anciens articles L.341-2, (aujourd’hui L.331-1) et L.341-3 (aujourd’hui art. L. 331-2) du Code de la consommation, et celles de l’ancien article 1326 du Code civil (aujourd’hui 1376), relatifs aux mentions manuscrites obligatoires dans tout acte de cautionnement solidaire consenti au profit d’un professionnel. Le pourvoi est donc rejeté.

 

III – La Cour de cassation dispense ainsi les cautionnements par acte authentique du formalisme exigé à titre de validité pour que le cautionnement soit solidaire

 

L’article L.341-3 du Code de la consommation précise la mention manuscrite exigée à peine de nullité lorsque le cautionnement est solidaire :

 

« En renonçant au bénéfice de discussion défini à l’article 2298 du code civil et en m’obligeant solidairement avec X je m’engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu’il poursuive préalablement X » .

 

Cet article ne précise pas s’il s’applique seulement aux cautionnements par acte sous seing privé. Deux lectures du texte étaient dès lors permises. La première respectait la lettre du texte et conduisait donc à ne pas opérer de distinctions entre les cautionnements. La Cour de cassation dans son interprétation des dispositions figurant dans le Code de la consommation a déjà donné l’exemple de telles analyses respectueuses de la lettre des textes. Elle a ainsi refusé d’exclure les cautionnements souscrits par les dirigeants du domaine d’application des dispositions. De même, elle a donné du créancier professionnel la définition la plus large possible, refusant à juste titre de l’assimiler à l’établissement de crédit.

 

Mais une telle lecture n’était guère cohérente avec le régime jurisprudentiel de l’acte authentique. En effet, avec constance, la Cour de cassation considère que le formalisme de l’acte authentique se suffit à lui-même et que les exigences manuscrites imposées à titre de validité ne s’appliquent pas à cette catégorie d’acte. La Cour de cassation avait déjà énoncé cette solution lors de son interprétation de l’article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 relatif au cautionnement du locataire[1]. Elle l’avait aussi retenue pour l’interprétation de l’ancien article L.313-8 du Code de la consommation rédigé en des termes comparables à l’ancien article L.341-3[2]. Cette solution a aussi été énoncée par la Chambre commerciale[3].

 

En réalité, seule l’étendue du cautionnement doit être précisée dans l’acte authentique. Une difficulté persiste toutefois car, en l’espèce, s’agissant d’une décision de justice et non d’un acte notarié, la caution ne bénéficie pas du conseil du rédacteur de l’acte.

 

Thomas LAILLER

Vivaldi-Avocats



[1] Cass. 3ème civ., 9 juill. 2008, n°07-10.926, FS-P+B

[2] Cass. 1ère civ., 24 févr. 2004, n° 01-13.930, F-P+B

[3] Cass. com., 6 juill. 2010, n°08-21.760, P+B+R+I

 

 

 

 

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