Cahier des charges de lotissement

Kathia BEULQUE
Kathia BEULQUE - Avocat associée

 

SOURCE : Cass.3ème Civ., 12 juillet 2018, n°17-21.081

 

C’est ce que précise la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, dans cette décision, publiée au bulletin, comme suit :

 

« … Sur moyen unique :

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 janvier 2017), que M. et Mme X…, propriétaires dans un lotissement, ont obtenu la condamnation sous astreinte de M. et Mme Y…, colotis, à couper leur haie à une hauteur de 80 centimètres, en application de l’article 17 du cahier des charges ; que, le 4 février 2015, M. et Mme X… ont assigné en liquidation d’astreinte, pour la période du 6 mai 2014 au 6 mars 2015, M. et Mme Y…, qui ont fait valoir que, par une délibération du 7 décembre 2013, l’assemblée générale de l’Association syndicale libre (ASL) avait modifié l’article 17 et limité la hauteur des haies à 1,80 mètre dans tout le lotissement ;

 

Attendu que M. et Mme X… font grief à l’arrêt de rejeter leurs demandes de condamnation de M. et Mme Y… à leur payer une astreinte pour n’avoir pas réduit à 80 centimètres la hauteur des plantations du lot n° 7 dont ils sont propriétaires, alors, selon le moyen :

 

1°/ que l’article L. 442-10 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005, entrée en vigueur le 1er octobre 2007, dispose que lorsque les deux tiers des propriétaires détenant ensemble les trois quarts au moins de la superficie d’un lotissement ou les trois quarts des propriétaires détenant au moins les deux tiers de cette superficie le demandent ou l’acceptent, l’autorité compétente peut prononcer la modification de tout ou partie des documents, notamment du règlement et du cahier des charges relatifs à ce lotissement, si cette modification est compatible avec le réglementation d’urbanisme applicable ; qu’en application de ce texte, la modification du cahier des charges du lotissement est soumise à autorisation de l’autorité compétente que les stipulations sur lesquelles elle porte ait ou non une nature réglementaire ; que pour débouter M. et Mme X… de leur demande, la cour a relevé que la modification par délibération de l’assemblée générale de l’association syndicale libre du 7 décembre 2013, de l’article 17 du cahier des charges portant à 1,80 m la hauteur des plantations pour les lots 6 et 7 du lotissement ne portait pas sur des stipulations de nature réglementaire du cahier des charges, de sorte qu’en application de l’article L. 442-10 du code de l’urbanisme, cette modification n’avait pas à être autorisée par l’autorité compétente ; qu’en faisant application à l’espèce de l’article L. 442-10 du code de l’urbanisme dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 qui opère une distinction selon que le cahier des charges est ou non doté d’une valeur réglementaire, laquelle n’était pas entrée en vigueur lors de l’assemblée générale de l’ASL du 7 décembre 2013 qui a modifié l’article 17 du cahier des charges et alors qu’en application du texte dans sa version applicable l’autorisation de l’autorité compétente était nécessaire, la cour d’appel a violé l’article L. 442-10 du code de l’urbanisme dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 8 décembre 2005, ensemble l’article 2 du code civil ;

 

2°/ que, est de nature réglementaire, la disposition d’un cahier des charges qui touche à la sécurité de la circulation dans un lotissement ; qu’en l’espèce, pour décider que la modification de l’article 17 du cahier des charges par l’assemblée générale de l’ASL du 7 décembre 2013 n’avait pas à être approuvée par l’autorité compétente, la cour a considéré que la stipulation relative à la hauteur des haies du lotissement et plus particulièrement, à la hauteur des haies au niveau des lots 6 et 7 n’était pas de nature réglementaire ; qu’en statuant de la sorte, quand l’article 17 du cahier des charges stipule que « les lots n° 6 et 7 devront supporter les servitudes en ce qui concerne les plantations situées dans la courbe du débouché de la voie du lotissement sur le chemin communal » et que « ces plantations ne devront pas avoir une hauteur supérieure à 0,80 m afin de ne pas gêner la visibilité », et institue donc une mesure réglementaire relative à la sécurité de la circulation automobile, qui doit être approuvée par l’autorité compétente, la cour d’appel a violé l’article L. 422-10 du code de l’urbanisme ;

 

3°/ que le cahier des charges constitue un document contractuel dont les clauses engagent les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues ; qu’en l’espèce, la cour a énoncé qu’il résultait de l’article 24 du cahier des charges du lotissement que ses modifications devraient être soumises aux dispositions de l’article L. 315-3 du code de l’urbanisme, abrogé par l’ordonnance du 8 décembre 2005, dont les dispositions sont reprises à l’article L. 442-10 du même code qui prévoit une majorité des deux tiers des propriétaires détenant ensemble les trois quarts au moins de la superficie d’un lotissement ou les trois-quarts des propriétaires au moins les deux tiers de ladite superficie ; qu’elle a relevé que la modification par délibération de l’assemblée générale de l’association syndicale libre du 7 décembre 2013, de l’article 17 du cahier des charges portant à 1,80 m la hauteur des plantations pour les lots 6 et 7 du lotissement, avait été votée à la majorité de l’article L. 315-3 reprise à l’article L. 442-10 du code de l’urbanisme, puisqu’adoptée par 8 propriétaires sur 11 ; qu’en statuant de la sorte, tandis que l’article L. 315-3 du code de l’urbanisme, devenu l’article L. 442-10 du même code, auquel renvoie l’article 24 du cahier des charges dispose que si une majorité qualifiée de propriétaires demande la modification du cahier des charges, cette modification doit être soumise à l’approbation de l’autorité administrative compétente, la cour d’appel a violé ensemble l’article 1134, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, du code civil et l’article L. 442-10 du code de l’urbanisme ;

 

4°/ que c’est seulement lorsque les deux tiers des propriétaires détenant ensemble les trois quarts au moins de la superficie d’un lotissement ou les trois quarts des propriétaires détenant au moins les deux tiers de cette superficie le demandent ou l’acceptent, que l’autorité compétente peut prononcer la modification du cahier des charges relatif à ce lotissement ; qu’en l’espèce, après avoir constaté que l’article L. 315-3 du code l’urbanisme, dont les dispositions sont reprises à l’article L. 442-10 du même code, prévoit que toute modification du cahier des charges doit être approuvée « par une majorité des deux tiers des propriétaires détenant ensemble les trois quarts au moins de la superficie d’un lotissement ou les trois-quarts des propriétaires détenant au moins les deux tiers de ladite superficie », la cour a relevé que la modification par délibération de l’assemblée générale de l’association syndicale libre du 7 décembre 2013, de l’article 17 du cahier des charges portant à 1,80 m la hauteur des plantations pour les lots 6 et 7 du lotissement, avait été votée « par 8 propriétaires sur 11, M. X… ayant voté contre et deux propriétaires s’étant abstenus » et donc à la majorité de l’article L. 315-3 reprise à l’article L. 442-10 du code de l’urbanisme ; qu’en statuant ainsi, sans rechercher si les deux tiers des propriétaires ayant voté en faveur de la modification de l’article 17 du cahier des charges, détenaient au moins les trois quarts de la superficie du lotissement, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 442-10 du code de l’urbanisme ;

 

Mais attendu, d’une part, que, M. et Mme X… n’ayant pas soutenu dans leurs conclusions d’appel que la disposition du cahier des charges relative à la hauteur des haies touchait à la sécurité de la circulation dans le lotissement, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit ;

 

Attendu, d’autre part, qu’ayant exactement retenu que la clause relative à la hauteur des haies du lotissement n’avait pas une nature réglementaire et que, conformément aux stipulations du cahier des charges, sa modification avait été adoptée à la majorité de l’article L. 315-3 du code de l’urbanisme, reprise à l’article L. 442-10, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, en a déduit à bon droit que la modification votée le 7 décembre 2013 n’avait pas à être approuvée par l’autorité compétente ;

 

D’où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n’est pas fondé sur le surplus ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

REJETTE le pourvoi ;… » 

 

Kathia BEULQUE

Vivaldi-Avocats

 

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