SOURCE : Cass.3ème Civ., 30 novembre 2017, n°16-13.019
C’est ce que précise la Troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, dans cette décision, inédite, comme suit :
« …
Donne acte à la Mutuelle des architectes français du désistement partiel de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre les sociétés Socotec, SMABTP, Isolation du Sud-Isosud, l’Auxiliaire et Tata Steel France bâtiments et systèmes ;
Joint les pourvois n° H 16-13.019 et U 16-13.467 ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 27 novembre 2015), que la société Gyma a entrepris des travaux d’extension de ses bâtiments de production ; qu’elle a souscrit une police dommages-ouvrage auprès de l’UAP, aux droits de laquelle se trouve la société Axa France IARD (société Axa) ; que sont intervenues la société ECC, depuis en liquidation judiciaire, en qualité d’entreprise générale et de maître d’oeuvre, assurée au titre de la responsabilité décennale auprès de la société Axa, et la société EGE, depuis en liquidation judiciaire, en qualité de bureau d’études et de sous-traitante de la société ECC, assurée auprès de la MAF ; que les travaux ont été réceptionnés ; que, se plaignant de désordres affectant notamment les carrelages « anti-acides », la société Gyma a, après expertise, assigné en indemnisation l’assureur dommages-ouvrage, ces intervenants à la construction et leurs assureurs ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° U 16-13.467, pris en ses trois premières branches, délibéré par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation après débats à l’audience publique du 16 mai 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Vaissette, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, M. Graveline, greffier de chambre :
Attendu que la Mutuelle des architectes français fait grief à l’arrêt de la condamner, in solidum avec la société Axa France IARD, à payer à la société Gyma les sommes de 685 762 euros, 1 464 914 euros, 280 910 euros, 68 622 euros et 16 895 euros alors, selon le moyen :
1°/ qu’en cas de redressement judiciaire, le tribunal charge l’administrateur judiciaire d’assister le débiteur pour tous les actes relatifs à la gestion ou certains d’entre eux, ou d’assurer l’administration de l’entreprise ; que le juge ne peut donc prononcer une condamnation au bénéfice d’une partie en redressement judiciaire sans avoir justifié que le droit d’agir en justice n’avait pas été transféré à l’administrateur judiciaire ; qu’en l’espèce, la MAF a, dans ses conclusions d’appel, invoqué l’irrecevabilité des demandes de la société Gyma, mise en redressement judiciaire par jugement du 30 juillet 2010, en soutenant que les mentions portées sur le K bis de cette société ne permettaient pas de connaître la mission de l’administrateur judiciaire et donc de considérer que la société pouvait agir en responsabilité seule, sans l’assistance du mandataire judiciaire ; que pour prononcer des condamnations au bénéfice de cette société, la cour a relevé que l’administrateur judiciaire devait seulement, selon l’article L. 622-1 du code de commerce, surveiller le débiteur dans sa gestion et l’assister pour tous les actes de gestion ou certains d’entre eux ; qu’en statuant ainsi, sans avoir établi que le droit d’agir en justice n’entrait pas dans la mission de l’administrateur, la cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard de l’article L. 631-12 du code de commerce ;
2°/ que lorsqu’un plan de sauvegarde a été adopté, les actions introduites avant le jugement qui arrête le plan et auxquelles l’administrateur ou le mandataire judiciaire étaient parties sont poursuivies par le commissaire à l’exécution du plan ; qu’est donc irrecevable une demande présentée par une société ayant bénéficié d’un plan de sauvegarde si l’administrateur judiciaire aurait du être partie à l’instance et que le commissaire à l’exécution du plan n’est pas non plus partie ; qu’en l’espèce, il résulte des constatations mêmes du jugement, confirmé par la cour d’appel, que le tribunal de commerce d’Avignon a arrêté un plan de sauvegarde de la société Gyma et a nommé M. X… en qualité de commissaire à l’exécution du plan ; qu’il est constant que M. X… n’a pas été partie à l’instance devant le tribunal ni devant la cour d’appel ; qu’en accueillant néanmoins les demandes de condamnation présentées par la seule société Gyma, la cour d’appel a violé l’article L. 626-25 du code de commerce ;
3°/ que dans ses conclusions d’appel, la Mutuelle des architectes français a fait valoir que les mentions portées sur le K bis de la société Gyma ne permettaient pas de connaître le contenu du plan de sauvegarde et les conditions de la cession partielle d’activité, et donc de vérifier la régularité de la procédure ; qu’en accueillant les demandes de condamnation présentées par la société Gyma, sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que la société Gyma n’a pas fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire mais d’une procédure de sauvegarde, avec désignation d’un administrateur judiciaire chargé, aux termes de l’extrait du registre du commerce et des sociétés produit devant les juges du fond, de surveiller la société débitrice dans sa gestion, de sorte que la société débitrice avait seule qualité pour agir en justice ; que la cour d’appel, qui n’avait pas à répondre aux conclusions inopérantes invoquées par la troisième branche, ni à s’interroger sur le contenu de la mission de l’administrateur au regard de l’article L. 631-12 du code de commerce qui ne concerne pas la procédure de sauvegarde, a légalement justifié sa décision d’écarter la fin de non-recevoir ;
Et attendu, en second lieu, que, ni l’administrateur, ni le mandataire judiciaire n’ayant été parties à l’action introduite par la société Gyma contre les constructeurs et les assureurs avant sa mise en sauvegarde, le commissaire à l’exécution du plan, désigné après l’adoption du plan, qui ne représente pas le débiteur, ne pouvait poursuivre l’instance ; que la cour d’appel a, en conséquence, écarté à bon droit la fin de non-recevoir tirée de l’absence en la cause du commissaire à l’exécution du plan ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; … »
Kathia BEULQUE
Vivaldi-Avocats