Comment calculer le délai de prescription d’une demande de nullité de brevet ?

Virginie PERDRIEUX
Virginie PERDRIEUX

 

Source :   Cour d’Appel de PARIS, Pôle 5, 2ème Chambre, 22 septembre 2017, RG n° 2014/25130, affaire Christophe H, Béatrice P et MATERIAUX EQUIPEMENTS PLASTIQUES S.A.S. c/ RACCORDS ET PLASTIQUES NICOLL S.A.S.

 

Le Code de propriété intellectuelle ne prévoit aucune prescription particulière quant à l’action en nullité d’un brevet. Ainsi, cette action est soumise au droit commun de la prescription, tel qu’énoncé comme suit à l’article 2224 du Code Civil issu de la réforme du 17 juin 2008 : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

 

Depuis lors, la jurisprudence ne parvient pas à se fixer sur le point de départ de la prescription quinquennale, puisqu’il a été notamment jugé :

 

– qu’il ne pouvait être admis que le point de départ soit celui de la publication de la demande de brevet, car à ce stade le titre est encore susceptible d’évoluer et la question juridique pendante n’est pas celle de la détermination du droit du titulaire sur le brevet, mais de l’opposabilité aux tiers, de sorte qu’il est préférable de retenir la date de la publication de la délivrance du brevet[1] ;

 

– au contraire, que la prescription de l’action en nullité d’un brevet ne pouvait courir à l’égard d’un tiers qu’à compter de la date de la publication de la demande de brevet[2] ;

 

– mais encore, qu’il appartenait au Tribunal de déterminer in concreto la date de connaissance de cette cause de nullité en fonction des circonstances de l’espèce, qui n’est pas nécessairement la date de délivrance du titre[3].

 

Aux termes de sa décision en date du 22 septembre 2017, la Cour d’Appel de PARIS revient aux termes mêmes de l’article 2224 du Code Civil, en ce qu’il dispose que la prescription court du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

 

Ce faisant, elle rappelle que la matière des brevets fait l’objet d’une réglementation spécifique aux termes de laquelle sont publiés la demande de brevet, puis le brevet, ces mesures étant destinées à assurer une information des tiers et à préserver les droits du titulaire. Aussi, si la demande de publication d’un brevet ne fait pas acquérir de droit au breveté, la publication du brevet constitue une reconnaissance de ces droits.

 

La Cour retient au titre du point de départ du délai de prescription pour exercer une action en nullité d’un brevet la date de publication de celui-ci, aux termes de l’attendu de principe suivant : « Il ne peut être contesté que la publication d’un brevet constitue pour les tiers un moyen de connaître leurs droits et que dès lors un professionnel exerçant dans le même domaine que le breveté et qui introduit sur le marché un nouveau produit est tenu de respecter les droits ayant donné lieu à publicité sans pouvoir arguer de son ignorance ».

 

Ainsi, passé le délai de 5 ans à compter de la publication du brevet, il n’est permis pour un tiers d’agir en nullité de celui-ci quand bien même il serait fondé à soulever ce moyen à titre d’exception dans le cadre d’une action en contrefaçon formée à son encontre par le breveté.

 

Virginie PERDRIEUX

Vivaldi-Avocats


[1] TGI PARIS, 3ème Ch., 3ème Section, 13 mars 2015, RG n° 2013/09605, affaire BOLTON MANITOBA SPA c/ RECKITT BENCKISER LLC.

[2] CA PARIS, Pôle 5, 1ère Ch., 8 novembre 2016, RG n° 2014/15008, aff. Philippe G. c/ EVINERUDE S.A.R.L.

[3] TGI PARIS, 3ème Ch., 3ème Section, 18 décembre 2015, RG n° 2014/04698, aff. MYLAN S.A.S. c/ F HOFFMANN-LA ROCHE AG S.A.

 

 

Partager cet article