SOURCE : Tribunal de Grande Instance de Paris, 3ème chambre, 1ère section, 18 juin 2015, Aff. S.A. ORANGE c/ S.A.S. FREE et S.A.S. FREEBOX, RG n° 14/05735
La société ORANGE, ayant pour activité de fournir des produits et services de communications de téléphonie fixe et mobile et d’internet haut débit, est titulaire de plusieurs brevets, et notamment d’un brevet européen intitulé « Basculement de sessions multimédias d’un terminal mobile vers un équipement d’un réseau local ».
La société concurrente FREE a développé un boîtier électronique appelé « Freebox » servant d’interface entre le réseau Free et les équipements informatiques et/ou audiovisuels et/ou téléphoniques de l’abonné, qui intègre depuis juin 2013 une application dite « Free Compagnon », ayant notamment pour fonctionnalité de permettre à l’utilisateur de lancer le contenu audiovisuel sur un équipement audiovisuel depuis son terminal mobile connecté.
La société ORANGE estimant que l’offre « Freebox Révolution » incluant cette application présentait une fonction de basculement de session multimédia susceptible de reproduire son invention brevetée, a assigné la société FREE devant le Tribunal de Grande Instance de Paris en contrefaçon sur le fondement de l’article L.613-3 et suivants et L.615-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Les demandes de la société ORANGE n’ont pas résisté à l’analyse préalable obligatoire de la validité du brevet revendiqué, puisque l’article 52, deuxième alinéa, de la Convention européenne des brevets dispose que :
« Ne sont pas considérés comme des inventions au sens du paragraphe 1 notamment :
a) Les découvertes, théories scientifiques et les méthodes mathématiques ;
b) Les créations esthétiques ;
c) Les plans, principes et méthodes dans l’exercice de l’activité intellectuelle en matière de jeu ou dans les domaines des activités économiques, ainsi que les programmes d’ordinateurs ;
d) Les présentations d’informations ».
Comme a entendu le rappeler le Tribunal de Grande Instance de Paris, l’article 52 du CBE est parfaitement clair et ne nécessite aucune interprétation : les programmes d’ordinateur en tant que tels sont exclus de la brevetabilité et ce, pour la raison qu’ils sont couverts par le droit d’auteur.
Le brevet déposé contra legem par la société ORANGE a ainsi été annulé, emportant le rejet de l’ensemble de ses demandes.
Un question évidente se pose au vu de ce qui précède : si la solution apparaît aussi claire en droit, pourquoi les sociétés persistent elles à déposer des brevets portant sur des logiciels ? Tout simplement parce que, même juridiquement fragile, le brevet continuer à constituer un élément de valorisation en termes comptables et financiers aux yeux des entreprises.
Virginie PERDRIEUX
Vivaldi-Avocats