Source : Cass. Com. 27 janvier 2015, Pourvoi n°13-20.463 FS-P+B
La jurisprudence de la Cour de Cassation semble, en ce moment, comporter de nombreuses décisions relatives à la question du pouvoir juridictionnel du Juge-Commissaire.
L’arrêt ici commenté en est un nouvel exemple, même si la décision, pour un commentateur au fait de la dernière jurisprudence en la matière, ne cause pas de grande surprise.
En effet, un débiteur, dans le cadre d’une procédure de vérification d’une créance d’une banque, avait soulevé un argument relatif à une supposée responsabilité de l’établissement bancaire qui lui aurait causé un préjudice.
Les juges du fond ont considéré que le préjudice allégué (la banque aurait laissé croire faussement au débiteur qu’elle interviendrait à première demande en cas de défaillance de la société) était sans rapport avec la créance dont se prévalait la banque (fondée sur une ouverture de crédit).
Dans la mesure où l’argument du débiteur était à ce point décorellé de la créance déclarée, la Cour d’Appel avait ainsi déclaré irrecevable le moyen de défense, dans le cadre de la vérification du passif.
La Cour de Cassation censure la décision d’appel. Elle rappelle qu’un juge-commissaire qui est « saisi d’une contestation ne relevant pas de son pouvoir juridictionnel, et susceptible d’avoir une incidence sur l’existence, le montant ou la nature de la créance déclarée, est tenu de surseoir à statuer sur la mission de celle-ci, après avoir invité les parties à saisir le juge compétent ».
La formule est suffisamment large pour permettre d’y inclure tous les moyens de défense qui auraient pour effet de faire apparaître des créances connexes, et dès lors susceptibles d’opérer une compensation, qui est de droit dans le cadre d’une procédure collective (article L.622-7 du Code de Commerce).
Tel est à cet effet, le cas en l’espèce, puisque l’argument soulevé est un moyen de défense au fond, destiné à créer une créance de compensation, avec les sommes dues à la banque.
Il n’appartient cependant pas au Juge-Commissaire de juger de la pertinence du moyen, examen qui est de la compétence des juges du fonds.
Constatant ainsi son défaut de pouvoir juridictionnel en la matière, le Juge-Commissaire, que le moyen soit fantaisiste ou non, doit simplement surseoir à statuer et inviter les parties à saisir les juridictions du fond compétentes.
Cette jurisprudence s’inscrit clairement dans la droite ligne des dernières décisions en la matière.
Etienne CHARBONNEL
Vivaldi-Avocats