Sanction d’une prise d’heures de délégation injustifiée par un représentant du personnel : le licenciement est encouru.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

  

SOURCE : CE,4ème et 5ème SSR, 27 mars 2015, , n° 371174 et 371500.

 

Une salariée exerçant les fonctions de chauffeur routier pour une société de transport médical cumulait des fonctions de représentant des salariés.

 

Elle était, à la fois, déléguée du personnel, membre du comité d’entreprise, déléguée syndicale et représentante syndicale au siège CHSCT.

 

A ce titre, elle disposait d’un certain nombre d’heures de délégation qu’elle a pris afin de pouvoir travailler au sein d’une autre entreprise. Elle en fit de même pendant ses périodes de congés payés.

 

C’est dans ces circonstances que l’entreprise demandait à l’Inspecteur du Travail d’autoriser son licenciement au motif qu’elle avait, durant ses congés payés et ses heures de délégation, exercé une activité salarié auprès d’au moins une autre société.

 

L’Inspecteur du Travail ayant refusé d’accorder l’autorisation demandée, la société a saisi, par recours hiérarchique, le Ministre du Travail qui, quant à lui, accordait l’autorisation sollicitée.

 

Toutefois, sur la demande de la salariée, le Tribunal Administratif de LYON va annuler la décision du Ministre par un Jugement du 15 mai 2012, de même que la Cour Administrative d’Appel de LYON, par un Arrêt du 20 juin 2013, va rejeter l’appel formé par l’employeur contre ce Jugement, au motif que les agissements litigieux n’avaient pas été accomplis à l’occasion de l’exécution, par l’intéressée, de son contrat de travail, de sorte qu’ils ne pouvaient pas justifier un licenciement pour faute.

 

Ensuite de cette décision, l’employeur se pourvoit en Cassation.

 

Bien lui en prit, puisque le Conseil d’Etat, dans l’Arrêt précité du 27 mars 2015, rappelant que le licenciement des salariés représentant du personnel ne peut intervenir que sur autorisation de l’Inspecteur du Travail, pour autant que le licenciement ne soit pas en rapport avec les fonctions représentatives exercées ou avec leur appartenance syndicale, que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l’Inspecteur du Travail de rechercher si les faits reprochés au salarié sont d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l’ensemble des règles applicables au contrat de travail de l’intéressé et des exigences propres à l’exécution normale du mandat dont il est investi, qu’un agissement du salarié intervenu en dehors de l’exécution de son contrat de travail, et notamment durant ses heures de délégation, ne peut motiver un licenciement pour faute, sauf s’il traduit la méconnaissance par l’intéressé d’une obligation découlant de ce contrat.

 

C’est ainsi que le Conseil d’Etat relevant que le Ministre du Travail s’était fondé pour autoriser le licenciement de la salariée sur le fait qu’elle avait utilisé 105 heures de délégation pour exercer une activité salariée au sein d’une autre entreprise, que l’utilisation par un salarié protégé de ses heures de délégation pour exercer une autre activité professionnelle méconnaît l’obligation de loyauté à l’égard de son employeur qui découle de son contrat de travail et que dès lors, la Cour Administrative d’Appel de LYON, en se fondant sur la seule circonstance que ces agissements n’avaient pas été accomplis à l’occasion de l’exécution par l’intéressée de son contrat de travail pour en déduire qu’ils ne pouvaient pas justifier un licenciement pour faute, a commis une erreur de droit, de sorte que son Arrêt doit être annulé.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

 

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