Salariée enceinte déclarée inapte : attention à la motivation du licenciement.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Cass Soc., 03 novembre 2016, Arrêt n°15-15.333, FP-P+B.

 

Une salariée avait été engagée en qualité de professeur de danse par une association dans le cadre d’un contrat à durée déterminée à temps partiel, transformé ensuite en contrat de travail à durée indéterminée pour une durée lissée sur l’année, ceci par contrat en date du 05 juillet 2007.

 

Enceinte, la salariée va bénéficier à compter du 12 novembre 2008 d’un congé maternité jusqu’au 03 mars 2009.

 

La salariée ayant accouché d’un enfant sans vie le 18 décembre 2008, elle va, à l’expiration de son congé de maternité être placée de nouveau en arrêt de travail à compter du 04 mars 2009 pour syndrome anxio-dépressif du post mortem.

 

Dans le cadre de la visite médicale de reprise du 12 mars 2009, le médecin du travail va déclarer la salariée inapte à son poste de travail et à tout poste dans l’entreprise, sans seconde visite, au visa de l’article R.4624-31 du Code du Travail.

 

Par courrier du 07 mai 2009, la salariée va aviser son employeur du fait qu’elle était de nouveau enceinte, en lui adressant un certificat médical attestant de son état de grossesse.

 

Pourtant, l’association va la convoquer par un courrier du 15 juillet 2009 à un entretien préalable auquel la salariée ne se présentera pas.

 

La salariée sera licenciée par un courrier du 30 juillet 2009 lui notifiant son licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement, licenciement que la salariée va contester en saisissant le Conseil des Prud’hommes.

 

Saisie de cette affaire, la Cour d’Appel de BORDEAUX, dans un Arrêt du 28 janvier 2015, va décider que le licenciement de la salariée était nul, dans la mesure où l’employeur ayant connaissance de l’état de grossesse depuis le mois de mai 2009, il ne pouvait la licencier que pour faute grave ou impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à sa grossesse ou à son accouchement.

 

Or, la lettre de licenciement n’était motivée par aucun des deux seuls motifs susceptibles de justifier le licenciement de la salariée enceinte en application de l’article L.1225-4 du Code du Travail, le motif invoqué dans la lettre relatif à son inaptitude physique et à l’impossibilité de la reclasser ne pouvant valablement s’y substituer, d’autant que le lien entre l’inaptitude de la salariée et l’état de grossesse n’était pas expressément exclu par l’employeur.

 

Ensuite de cette décision, l’employeur forme un pourvoi en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, il prétend que l’inaptitude prononcée par le médecin du travail à l’égard de la salariée avait rendu impossible le maintien du contrat de travail et qu’en outre, la limitation par l’article L.1225-4 du Code du Travail des causes possibles de licenciement d’une salariée en état de grossesse médicalement constaté ne concerne que le bien fondé du licenciement et est sans incidence sur ce dernier.

 

Mais la Chambre Sociale ne va pas suivre l’employeur dans son argumentation.

 

Relevant au contraire qu’il résulte des dispositions combinées des articles L.1232-6 et L.1225-4 du Code du Travail, que l’employeur est tenu d’énoncer le ou les motifs de licenciement dans la lettre de licenciement et qu’il ne peut résilier le contrat de travail d’une salariée en état de grossesse médicalement constaté que s’il justifie d’une faute grave de l’intéressée, non liée à l’état de grossesse ou de l’impossibilité où il se trouve pour un motif étranger à la grossesse, à l’accouchement ou à l’adoption de maintenir le contrat de travail, et énonçant qu’ayant constaté que la lettre de licenciement ne mentionnait aucun des motifs limitativement exigés par l’article L.1225-4 du Code du Travail, la Cour d’Appel en a exactement déduit que le licenciement était nul.

 

Par suite, la Chambre Sociale rejette le pourvoi.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

 

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