Refus d’attribution judiciaire d’un bien hypothéqué en cas de procédure collective.

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

 

Source : Cass.Com., 28 juin 2017, n°16-10591, n°954 P+B+I

 

I – Les faits.

 

Une personne subit une procédure de liquidation judiciaire qui sera étendue à son épouse.

 

La reprise de la procédure de saisie immobilière initiée par une Banque, créancier de second rang, reprend suite à l’ordonnance du juge-commissaire. Cette procédure tend à vendre un bien immobilier appartenant à l’épouse désormais concernée par la procédure collective.

 

Deux créanciers hypothécaires de premier rang interviennent à la procédure et conteste la régularité de la procédure et sollicitent, sur le fondement de l’article 2458 du Code civil l’attribution judiciaire du bien immobilier.

 

« A moins qu’il ne poursuive la vente du bien hypothéqué selon les modalités prévues par les lois sur les procédures civiles d’exécution, auxquelles la convention d’hypothèque ne peut déroger, le créancier hypothécaire impayé peut demander en justice que l’immeuble lui demeure en paiement. Cette faculté ne lui est toutefois pas offerte si l’immeuble constitue la résidence principale du débiteur. »

 

Cette demande était appuyée par le fait que les créanciers hypothécaires primaient la Banque dans l’ordre des privilèges.

 

II – La question de droit.

 

L’attribution judiciaire peut être admise en cas de procédure collective du débiteur sur le fondement de l’article L642-20-1 du Code de commerce qui précise dans son alinéa 2 :

 

« Le créancier gagiste, même s’il n’est pas encore admis, peut demander au juge-commissaire, avant la réalisation, l’attribution judiciaire. Si la créance est rejetée en tout ou en partie, il restitue au liquidateur le bien ou sa valeur, sous réserve du montant admis de sa créance. »

 

Autrement dit, certes l’attribution judiciaire peut être admise dans le cadre d’une procédure collective, mais le texte prévoit que le créancier doit être un créancier gagiste !

 

III – A retenir.

 

La Cour de cassation saisie du litige doit donc s’interroger sur l’extension du texte précité au créancier hypothécaire.

 

La Cour de cassation refuse cette extension du texte et précisera « Mais attendu que la demande d’un créancier hypothécaire impayé tendant à ce que l’immeuble grevé lui demeure en paiement, par application de l’article 2458 du Code civil, tend au paiement d’une somme d’argent, au sens de l’article L. 622-21 du code de commerce, et, qu’à défaut de disposition autorisant, par dérogation au principe de l’interdiction des poursuites posé par ce texte, la présentation d’une telle demande en cas de procédure collective, comme il en existe pour l’attribution judiciaire du gage, la demande d’attribution judiciaire de l’immeuble hypothéqué est irrecevable ; que le moyen qui postule le contraire n’est pas fondé ; »

 

Il faut retenir que :

 

– Tout d’abord la Cour se refuse à étendre le principe de l’attribution judiciaire du créancier gagiste au créancier hypothécaire puisque cela contreviendrait au principe d’interdiction de toute action en justice visant au paiement d’une dette antérieure au jugement d’ouverture posé par l’article L. 622-21 du code de commerce

 

– Mais également, la Cour réitère par cet arrêt le caractère unique du gage et la dérogation introduite par l’article L642-20-1 pour les créanciers gagistes qui ne pourra s’étendre aux autres suretés prévues par le législateur.

 

Jacques-Eric MARTINOT

Vivaldi Avocats

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