Source : Cass.Com., 24 janvier 2018, n° 16-18795, F-P+B
I – Le cas d’espèce.
Les faits sont tout à fait classiques. Une société donne en location avec option d’achat du matériel agricole à une société qui finira par être placée en liquidation judiciaire deux ans plus tard.
Saisi sur requête, et par application des dispositions de l’article L 642-19 du Code de commerce, le Juge commissaire autorisera par ordonnance la vente aux enchères publiques de l’ensemble du matériel d’exploitation et du matériel roulant composant l’actif de la société liquidée.
Il faut tout de suite remarquer que la moissonneuse batteuse donnée en location avec option d’achat est inclus dans le matériel destiné à la vente forcée.
En sa qualité de créancier inscrit, la société bailleresse interjette appel de l’ordonnance suite à la notification qui en a découlé conformément aux dispositions de l’article L641-3 du Code de commerce.
En effet, le contrat de location d’achat fait l’objet d’une publicité au registre du commerce et des sociétés à l’image du crédit-bail.
II – La procédure.
La Cour d’appel saisi du litige déclarera irrecevable l’appelant au motif que « l’ordonnance querellée est susceptible d’affecter les droits et obligations de la bailleresse du matériel dont la cession est notamment autorisée, mais que la société n’étant pas partie à la procédure de première instance, le droit d’appel ne lui est pas ouvert et que son appel est irrecevable par application de l’article 546 du code de procédure civile, seule la voie de la tierce opposition lui étant ouverte dans une telle hypothèse ; »
Un pourvoi est alors interjeté. Les juges du Quai de l’horloge casseront l’arrêt d’appel en précisant « qu’en statuant ainsi, alors que les droits et obligations de la société Béarn motoculture, bailleresse propriétaire d’un matériel inclus dans le périmètre de la vente ordonnée par le juge-commissaire, étant affectés par l’ordonnance de ce dernier, elle était recevable à former le recours devant la cour d’appel prévu par l’article R. 642-37-3 du code de commerce, la cour d’appel a violé ce texte ».
La Cour d’introduire la solution par un chapeau rappelant non seulement que :
« Les ordonnances rendues en application de l’article L. 642-19 sont, à la diligence du greffier, notifiées au débiteur et communiquées par lettre simple aux contrôleurs. Les recours contre ces décisions sont formés devant la cour d’appel. »
Mais surtout « qu’il résulte de ce texte que le recours contre les ordonnances du juge-commissaire rendues en application de l’article L. 642-19 du code de commerce est formé devant la cour d’appel ; que ce recours est ouvert aux parties et aux personnes dont les droits et obligations sont affectés par ces décisions ».
Autrement dit, la Cour de cassation fait une application stricte du texte et rappelle que si l’ordonnance prise par le juge-commissaire, relative à la vente de différents biens de la société débitrice, affecte les droits et obligations de la bailleresse du matériel inclus dans le périmètre de la vente ordonnée, cette bailleresse, bien qu’ayant été absente en première instance, est recevable à faire appel sur le fondement de l’article R. 642-37-3 du code de commerce.
Jacques-Eric MARTINOT
Vivaldi-Avocats