SOURCE : Projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises n° 1088 – article 9
A l’heure actuelle, les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions sont tenues de désigner un commissaire aux comptes dans tous les cas, à la différence des autres formes de sociétés commerciales, qui ne sont tenues à cette obligation que lorsqu’elles dépassent une certaine taille, appréciée en fonction de seuils de chiffre d’affaire, de total du bilan et de nombre de salariés.
Pour information, les SARL, EURL, SNC et SCS ont l’obligation de désigner un commissaire aux comptes lorsqu’elles dépassent deux des trois seuils suivants :
– 1 550 000 € de bilan,
– 3 100 000 € de chiffre d’affaires HT,
– 50 salariés.
Les SAS quant à elles sont tenues de désigner un commissaire aux comptes :
– si elles dépassent deux des trois seuils suivants :
1 000 000 € de total de bilan
2 000 000 € de chiffre d’affaires HT
20 salariés
– ou si la SAS est contrôlée par une société ou contrôle une autre société.
1. L’obligation de désigner un commissaire aux comptes dans toutes les SA et SCA serait supprimée
La loi Pacte souhaite harmoniser les obligations des sociétés commerciales en matière de certification des comptes, les dispositions de l’article 9 consistent donc à introduire des seuils pour la désignation d’un commissaire aux comptes par les SA et les SCA. Ces seuils seraient identiques pour toutes les sociétés commerciales.
Si ces seuils ne sont pas atteints, la nomination d’un commissaire aux comptes pourra toujours être demandée en justice par un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 10% du capital social[1].
En revanche, les entités d’intérêt public (sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché règlementé, banques, assurances) resteraient tenues de nommer un commissaire aux comptes quelle que soit leur taille.
Le Code de commerce est donc adapté en vue de la suppression des commissaires aux comptes dans certaines de ces sociétés.
Ainsi, certains rapports actuellement établis par le commissaire aux comptes le seraient désormais par le président du conseil d’administration (rapport sur les conventions réglementées notamment).
Un commissaire aux comptes devrait toutefois être spécialement désigné par les associés pour établir certains rapports (rapport sur le prix d’émission des actions en cas d’augmentation du capital social avec suppression du DPS sans indication du nom des bénéficiaires ; rapport sur l’attribution d’actions gratuites…)[2].
2. Harmonisation et relèvement des seuils de désignation d’un commissaire aux comptes
En cohérence avec les dispositions applicables pour les autres sociétés commerciales, et avec l’article 34 de la directive 2013/34/UE (dite « directive comptable »), ces seuils seront définis en fonction du chiffre d’affaire, du total du bilan et du nombre de salariés.
Un décret devrait fixer le niveau de ces seuils et les harmoniser au niveau des seuils européens de référence. Ainsi, une société commerciale dépassant deux des trois seuils suivants serait tenue de désigner un commissaire aux comptes :
– 4 000 000 € de total de bilan,
– 8 000 000 € de chiffre d’affaires HT,
– 50 salariés[3].
3. L’obligation de désigner un commissaire aux comptes dans une société qui en contrôle d’autres
Afin d’éviter qu’un groupe de sociétés n’échappe à toute obligation de certification des comptes, du fait de sa structuration en plusieurs entités de petite taille, le projet de loi Pacte introduit une disposition imposant aux sociétés qui contrôlent d’autres sociétés de désigner un commissaire aux comptes, dès lors que l’ensemble formé par la société mère et ses filiales excède les seuils de désignation, indépendamment de l’obligation d’établir des comptes consolidés.
Cette obligation ne devrait toutefois pas s’appliquer lorsque la personne qui contrôle une ou plusieurs sociétés est-elle même contrôlée par une personne qui a nommé un commissaire aux comptes[4].
En revanche, la règle spécifique aux sociétés par actions simplifiées, qui impose la désignation d’un commissaire aux comptes dès lors que la société est liée à une autre par un lien de contrôle, est supprimée.
4. L’ouverture de nouvelles opportunités de structuration de groupe
Actuellement, le binôme holding / filiale (SAS) couplé à une convention de prestations de services de la holding à la filiale est très répandu dans les groupes de sociétés puisqu’il permet à la holding de facturer, avec une marge, à sa filiale la rémunération du dirigeant exerçant des fonctions techniques dans la société d’exploitation.
Ce dispositif a toutefois pour inconvénient majeur d’entraîner l’obligation de désigner un commissaire aux comptes dans la filiale (voire dans la holding si celle-ci est une SAS également).
En conséquence, s’il est appliqué aux PME et ETI, il entraîne un surcoût lié à la désignation d’un commissaire aux comptes ; ce dernier n’ayant, par ailleurs, qu’une plus-value limitée compte tenu de la taille financière et juridique du groupe.
Les SARL quant à elles ne peuvent pas appliquer ce dispositif puisque leur dirigeant est nécessairement une personne physique.
Avec la suppression de l’obligation de désigner un commissaire aux comptes dans toutes les SAS qui contrôlent une société ou sont contrôlées par une société, il serait opportun d’envisager la possibilité pour les SARL de se transformer en SAS et de constituer, si ce n’est pas déjà fait, une holding dirigeante afin de mettre en place une convention de prestations de services.
Dans cette hypothèse, il conviendra de vérifier si l’ensemble formé par la société mère et ses filiales excède les seuils de désignation d’un commissaire aux comptes, le cas échéant, seule la société mère sera tenue d’en désigner un.
Clara DUBRULLE
Vivaldi Avocats
[1] Projet de loi Pacte, article 9 9° et 12°
[2] Projet de loi Pacte, article 9, 7° et 8°
[3] Projet de loi Pacte, exposé des motifs
[4] Projet de loi Pacte, article 9, 16°