Prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur : si les manquements reprochés sont trop anciens, ils ne peuvent être considérés comme empêchant la poursuite du contrat de travail.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

 

SOURCE : Cass. Soc, 16 mars 2014, Arrêt n° 658 FP-P + B (n° 12-23.634).

 

Un salarié avait été engagé en qualité de responsable informatique par une société, ayant pour activité la réalisation d’expertises à distance sur photos numériques pour le compte de compagnies d’assurances, dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée le 1er juillet 2001.

 

Par courrier daté du 23 août 2006, il informait son employeur de sa décision de prendre acte de la rupture de son contrat de travail du fait de celui-ci, et reprochant à son employeur pas moins d’une vingtaine de faits divers, il exposait dans ce courrier que la bonne exécution de son contrat de travail ne lui paraissait plus possible en raison de l’inaction de son employeur dans la mise à sa disposition des moyens techniques et humains indispensables à la réalisation des missions qui lui étaient confiées et du non respect du droit du travail.

 

Sur ce, il quittait l’entreprise le 15 septembre suivant et saisissait le Conseil des Prud’hommes de NANTERRE d’un ensemble de demandes tendant à condamner son employeur au paiement de diverses sommes au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

D’abord débouté par le Conseil des Prud’hommes de NANTERRE, il saisissait du litige la Cour d’Appel de VERSAILLES.

 

Mais, la Cour d’Appel, par un Arrêt du 06 juin 2012, après avoir rappelé que la prise d’acte du salarié ne peut être imposée à l’employeur que si celui-ci a commis des manquements aux obligations essentielles qui découlent du contrat de travail d’une gravité suffisante, et après avoir examiné un à un l’ensemble des griefs allégués par le salarié, va considérer qu’il résultait de cet ensemble d’éléments que les manquements que l’employeur avait pu commettre dans l’exécution de son contrat de travail, étaient pour la plupart anciens et, qu’ils soient envisagés séparément ou dans leur globalité, n’étaient pas d’une gravité suffisante pour justifier la prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur.

 

Ensuite de cette décision, le salarié se pourvoit en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, il reproche à la Cour d’Appel trois griefs principaux, le premier relatif à l’absence d’effectivité de son droit à congés payés, le second portant sur l’absence d’informations par son employeur de ses droits acquis au titre du Droit Individuel à la Formation (DIF) et enfin le troisième sur la carence de l’employeur dans l’organisation des visites médicales périodiques auprès de la Médecine du Travail.

 

Mais la Haute Juridiction, relevant que la prise d’acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquements suffisamment graves de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail et relevant que la Cour d’Appel a retenu que les manquements de l’employeur étaient pour la plupart anciens, faisant ainsi ressortir qu’il n’avait pas empêché la poursuite du contrat de travail, a légalement justifié sa décision.

 

Par suite, la prise d’acte de la rupture effectuée par le salarié est qualifiée de démission.

 

La Haute Cour va toutefois casser partiellement l’Arrêt de la Cour d’Appel pour ce qui concernait les demandes du salarié en paiement de l’indemnité de congés payés et de la clause de non concurrence.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

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