Pollution de l’air

Harald MIQUET
Harald MIQUET

 

Source : Conseil d’Etat, 12 juillet 2017, L’association les Amis de La Terre contre France, n°394254

 

1.  L’essentiel de la décision

 

L’association « Les Amis de La Terre » a saisi le Conseil d’Etat aux fins d’annuler pour excès de pouvoir les décisions de rejet résultant du silence gardé par le gouvernement sur sa demande tendant à la mise en œuvre de toute mesure utile permettant de ramener sur l’ensemble du territoire national les concentrations en particules fines et en dioxyde d’azote à l’intérieur des valeurs limites fixées par la directive n°2008/50/CE[1].

 

L’association a également demandé l’annulation de la décision de refus du gouvernement d’élaborer des plans relatifs à la qualité de l’air permettant d’atteindre cet objectif.

 

Enfin, la requérante a également demandé au Conseil d’Etat d’annuler les décisions de refus d’enjoindre au gouvernement de réviser les plans de protection de l’atmosphère existants et d’ordonner toute mesure utile permettant d’assurer le respect des valeurs limites déterminées par la directive de 2008.

 

Par une décision du 12 juillet 2017, le Conseil d’Etat fait droit ces demandes et annule les décisions querellées en enjoignant au gouvernement de prendre toute mesure nécessaire pour que soit élaboré un plan relatif à la qualité de l’air permettant de ramener les concentrations autorisées dans un délai le plus court possible.

 

Le dispositif pose également une date butoir de transmission de ce plan à la Commission Européenne avant le 31 mars 2018.

 

2.   Focus juridique

 

Le référentiel juridique de cette décision est d’abord celui de la directive n°2008/50/CE du Parlement Européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et en air pur en Europe laquelle fait obligation aux Etats membres de surveiller la qualité de l’air ambiant sur le territoire.

 

Plus spécifiquement, l’article 13 de la directive pose une interdiction de dépassement des valeurs limite de concentration de polluants, notamment le dioxyde d’azote[2] et les particules fines PM10[3]. Ces valeurs limite ont été transposées à l’article R 221-1 du Code de l’Environnement.

 

L’article 23 de la directive précitée prescrit l’établissement, l’élaboration de plan relatif à la qualité de l’air.

 

Ces plans d’action peuvent comprendre des mesures ayant trait à la circulation des véhicules à moteur, aux travaux de construction, aux navires à quai et au fonctionnement de l’installation industrielle ou à l’utilisation de produits industriels et au chauffage domestique.

 

Ces plans d’action peuvent également envisager des actions plus spécifiques visant à protéger les catégories de population sensibles, notamment les enfants.

 

Le Conseil d’Etat ayant fait le constat d’un dépassement des seuils prescrits par les dispositions de la directive de 2008, ordonne, annule, la décision implicite du gouvernement d’élaboration des plans conformes à l’article 23 de la directive 2008/50/CE.

 

Mais l’intérêt de l’arrêt se situe très certainement quant aux mesures d’injonction qui sont prises par le juge administratif à l’encontre du gouvernement.

 

Ces mesures d’injonction visent précisément à prendre toute mesure nécessaire pour que soient élaborés et mis en œuvre des seuils de polluants dans l’air pour toutes les zones territoriales relevant de ce dépassement.

 

Ces mesures d’injonction sont la conséquence nécessaire de l’acquis jurisprudentiel de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) qui dans un arrêt du 19 novembre 2014, Client Earth C-404/13, a précisé que les dispositions issues de la directive n°2008/50/CE relevaient d’une obligation de résultat.

 

En conséquence de quoi, le seul formalisme d’établissement du plan relatif à la qualité de l’air ne permet pas de satisfaire à l’efficacité de la directive européenne.

 

L’obligation de résultat qui pèse sur les Etats membres implique qu’une juridiction nationale compétente puisse adopter toute mesure utile afin que l’Etat membre établisse le plan prescrit dans des conditions qui permettent son efficience.

 

Harald MIQUET

Vivaldi Avocats 


[1] Directive n°2008/50/CE du Parlement Européen et du Conseil du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe publiée au JOUE n° L152 du 11 juin 2008.

[2] Correspond à la somme du rapport de mélange en volume de monoxyde d’azote et de dioxyde d’azote, exprimé en unité de concentration massique de dioxyde d’azote.

[3] Particule passant dans un orifice d’entrée calibré tel que défini dans la méthode de référence pour l’échantillonnage et la mesure de PM10, norme EN12 341, avec un rendement de séparation de 50% pour un diamètre aérodynamique de 10 μ.

 

 

 

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