L’augmentation de 2 mois du délai de déclaration de créance pour un créancier étranger ne concerne que la déclaration des créances antérieures.

Etienne CHARBONNEL
Etienne CHARBONNEL - Avocat associé

En revanche, le créancier étranger qui déclare une indemnité de résiliation en cours de période d’observation ne bénéficie pas de cette augmentation de son délai de 2 mois

Source : Cass.Com., 18 janvier 2023, n°21-15.514, F-B

L’article L622-26, par renvoi à l’article L622-24, prévoit que les créanciers étrangers bénéficient d’un délai supplémentaire de 2 mois pour déclarer leurs créances.

L’arrêt ici commenté vient apporter une précision importante : de quelles créances exactement parlons-nous ?

En effet, en l’espèce, un débiteur est successivement placé en redressement puis en liquidation judiciaire.

Un créancier, avec lequel il était lié par un contrat de licence, met en demeure le liquidateur de se prononcer sur la poursuite du contrat, puis à défaut de réponse, déclare sa créance de résiliation de plein droit du contrat.

Ce faisant, le créancier fait usage du délai augmenté de 2 mois de l’article R622-24 du Code de Commerce.

Le liquidateur, soutenant que l’augmentation du délai de déclaration pour le créancier étranger ne s’applique qu’à la déclaration des créances antérieures, et non à la déclaration des indemnités de résiliation, conteste la déclaration, et obtient son rejet, confirmée par la Cour d’Appel.

Le créancier se pourvoit en cassation, soutenant :

  • Que l’augmentation de délai visée par R622-24 s’applique à toutes les déclarations de créances ;
  • Que juger autrement conduirait à violer l’article 14 de la CESDH et l’article 1 du Premier Protocole additionnel, en traitant différemment des justiciables placés dans des situations analogues.

S’agissant du champs d’application de 622-24, la Cour de Cassation vient confirmer que seule la déclaration des créances antérieures, visée à L622-26 et L622-24 est concernée par l’augmentation du délai de distance. La lecture du texte ne laissait guère de doute, mais la précision est bienvenue.

Plus intéressante est la réponse de la Cour au second moyen. Elle rejette également le moyen, considérant que le créancier déclarant une créance antérieure n’est pas dans la même situation que le créancier déclarant une indemnité de résiliation.

Le premier bénéficie en effet d’un délai augmenté, en raison des difficultés prévisibles pour un créancier étranger d’avoir connaissance de l’ouverture d’une procédure collective et de ses effets.

Le second, en revanche, n’a pas ce besoin de protection, car « les conditions procédurales et de fond de la résiliation des contrats en cours prévues aux articles L. 622-13 et L. 622-14 du code de commerce, rendus applicables au redressement judiciaire par l’article L. 631-14, et aux articles L. 641-11-1 et L. 641-12 du même code, garantissent au cocontractant une connaissance immédiate de la résiliation du contrat ».

Ainsi, la différence de traitement est justifiée et « située dans un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but poursuivi tenant à la détermination du passif de la procédure ».

Il est ainsi justifié de protéger le créancier étranger des difficultés d’accès à l’information d’une procédure en France. Mais dès lors qu’il a connaissance de l’information, en l’espèce l’existence d’une procédure collective, plus rien ne justifie qu’il soit mieux traité, s’agissant des délais procéduraux qu’il doit respecter, que les créanciers situés sur le territoire national.

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