Compétence du Juge de l’exécution pour constater l’extinction de la créance

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

Le Juge de l’exécution est compétent pour connaitre des contestations d’une mesure d’exécution forcée à raison de l’extinction de la créance pour une cause postérieure à la décision fondant la mesure.

Source : Cass.Civ.2., 8 décembre 2022, n°20-20233

Une caution est actionnée en garantie suite à la mise en liquidation judiciaire d’une société, emprunteuse principale.

Pour recouvrer sa créance, elle fait pratiquer une saisie attribution sur les comptes du garant en vertu d’une ordonnance de référé.

Appel est interjeté. La Cour validera le raisonnement tenu en premier instance par le Juge de l’exécution et estimera qu’il ne lui appartient pas de modifier le dispositif de la décision fondant les poursuites.

Aussi, la caution rappellera qu’il lui appartient de soulever les exceptions inhérentes à la dette. La caution précise également que le défaut de déclaration de créance dans le délai de 2 mois éteint la dette du débiteur principal.

Enfin, la caution rappelle que l’ordonnance fondant les poursuites a été rendue dasn le délau de 2 mois et que par conséquent, l’absence de déclaration de créance à la procédure collective est un fait postérieur.

La Cour estime que « le juge de l’exécution n’était pas compétent pour apprécier les causes d’extinction de la créance postérieure à la décision valant titre de créance, le juge de l’exécution ne pouvait remettre en cause le dispositif de cette décision définitive ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu ses pouvoirs, violant l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire. » 

Censure par la Cour de cassation : 

« 5. Pour confirmer le jugement entrepris, l’arrêt relève, d’abord, que le juge de l’exécution a dit qu’il ne lui appartenait pas de modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, que M. [N] critique cette motivation en faisant valoir que le juge de l’exécution doit prendre en compte les faits postérieurs à la délivrance de la décision, dès lors qu’ils auraient modifié le montant de la dette, que, se prévalant des dispositions de l’article 2313 du code civil qui autorisent la caution à se prévaloir de toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et sont inhérentes à la dette, M. [N] soutient que sa dette est éteinte comme celle du débiteur principal à défaut de déclaration de la créance à la procédure collective en vertu de l’article L. 621-46 ancien du code de commerce, que l’ordonnance de référé du 8 juin 1993 a été rendue avant l’expiration du délai de deux mois dont bénéficiait le créancier pour déclarer sa créance et que le défaut de déclaration de celle-ci est bien un fait postérieur à la décision qui fonde les poursuites. Il retient, ensuite, que le moyen ainsi soutenu par M. [N] procède d’une analyse erronée de la compétence du juge de l’exécution pour apprécier les causes d’extinction de la créance postérieures à la décision valant titre de créance et qu’à supposer que la créance à l’encontre du débiteur principal soit éteinte à défaut de déclaration à la procédure collective de la société JP Dara, il appartenait à M. [N] de le faire valoir dans le cadre d’un appel contre l’ordonnance de référé ou d’une instance devant le juge du fond et que le juge de l’exécution ne saurait remettre en cause le dispositif de cette décision définitive. »

Il résulte de la combinaison des articles 2313 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, 53, alinéa 4, de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, alors en vigueur, L. 213-6, alinéa 1er, du code de l’organisation judiciaire et R. 121-1 du code des procédures civiles d’exécution que les dispositions du dernier de ces textes, aux termes desquelles le juge de l’exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ni en suspendre l’exécution, ne font pas obstacle à ce qu’une caution, à l’encontre de laquelle a été pratiquée une mesure d’exécution forcée sur le fondement d’une décision l’ayant condamnée à exécuter son engagement, puisse invoquer devant le juge de l’exécution l’extinction de la créance garantie pour une cause postérieure à cette décision.

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