L’apport de titres, bénéficiant d’un sursis ou report d’imposition, détenus en propre à la communauté constitue une opération intercalaire

Clara DUBRULLE
Clara DUBRULLE

Source : Rép. Dassault, 29 septembre 2020, n° 6669

 

M. Olivier Dassault a attiré l’attention de M. le ministre de l’économie et des finances sur la position des services de son ministère au sujet de l’imposition des plus-values latentes grevant les titres sociaux apportés par des époux à une communauté conjugale.

 

En effet, lorsque des époux souhaitent modifier leur régime matrimonial pour rendre communs tout ou partie de leurs biens propres (comme cela est notamment le cas en cas d’adoption du régime de la communauté universelle), si l’un des époux est propriétaire d’actions de société qui lui ont été attribuées en contrepartie de divers apports à l’occasion desquels il a bénéficié des régimes de sursis et report d’imposition des articles 150-0 B, 150-0 B bis, 150-0 B ter du code général des impôts, se pose la question du maintien des sursis et reports d’imposition à l’occasion de la mise en communauté des actions. L’apport des titres à la communauté ne donne lieu à aucune rémunération en argent ou en titres évidemment.

 

La loi fiscale étant généralement favorable à la communautarisation des biens des époux, comme le démontrent par exemple l’exonération de taxe de publicité foncière et l’absence d’imposition des plus-values latentes lors de l’apport d’un bien immobilier, il est demandé à M. le ministre de l’économie et des finances de bien vouloir confirmer que l’apport de titres sociaux bénéficiant d’un sursis ou report d’imposition n’entraîne pas l’exigibilité de l’impôt sur les plus-values mobilières en sursis ou en report.

 

Autrement dit, M. Olivier Dassault demande confirmation que, au regard de l’imposition des plus-values, l’apport de valeurs mobilières à une communauté est une opération purement intercalaire comme l’est l’apport de biens immobiliers.

 

M. le ministre rappelle que l’imposition de la plus-value réalisée lors de certaines opérations d’apport de titres à des sociétés peut être différée dans le cadre du sursis d’imposition prévu par l’article 150-0 B du CGI, ou des reports d’imposition prévus par l’article 150-0 B ter du même code s’agissant d’apport à des sociétés contrôlées par le contribuable.

 

Les événements affectant les titres reçus en rémunération de l’apport et mettant fin au différé d’imposition susmentionné sont limitativement énumérés. Le changement de régime matrimonial portant adoption de la communauté universelle qui a pour effet de conférer aux biens propres de l’un des époux le statut de biens communs et d’attribuer ainsi sur ces biens à l’autre époux des droits dont il se trouvait initialement dépourvu (C.Cass 10/02/1998 n° 95-16924), n’est pas mentionné parmi ces événements. En particulier, le changement de régime matrimonial ne constitue pas une cession à titre onéreux.

 

Dans ces conditions, le transfert de titres, bénéficiant d’un sursis ou d’un report d’imposition prévus respectivement aux articles 150-0 B et 150-0 B ter du CGI, du patrimoine propre de l’un des époux à l’avoir de la communauté créée lors d’un changement de régime matrimonial, s’analyse bien comme une opération purement intercalaire.

 

En cas de cession ultérieure, les contribuables seront imposés sur une plus-value déterminée selon la valeur d’origine des titres apportés, pour les titres soumis au sursis d’imposition, ou sur la plus-value placée en report, pour les titres soumis à ce régime.

 

S’agissant des dispositions prévues à l’article 150-0 B bis du CGI relatives à l’apport de créances correspondant à des compléments de prix de cession de titres, une telle confirmation ne pourra être apportée que sur la base de la transmission à l’administration fiscale d’une description précise de la situation de faits concernée sous forme de demande de rescrit.

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