SOURCE : Cass. com., 08 octobre 2013, Arrêt n° 936 F – P + B (n° 12-24.825).
Une SARL avait cédé le 31 mars 2000 son fonds de commerce d’hôtel restaurant à une autre société, l’acte de cession prévoyant que le cédant s’obligeait à rembourser au cessionnaire les créances existantes au profit des salariés et non encore payées au jour de l’entrée en jouissance.
Le 31 mai 2006, la société vendeuse faisait l’objet d’une mise en dissolution anticipée, son gérant étant désigné liquidateur amiable.
Le 17 octobre 2006, la clôture des opérations de liquidation était prononcée ; l’ancien déchargé de ses fonctions de liquidateur était chargé de répartir le boni de liquidation.
Le 10 novembre 2006 la société vendeuse était radiée du registre du commerce et des sociétés.
La société cessionnaire, ayant été condamnée à payer diverses sommes au titre de rappels de salaires et d’indemnités à une ancienne salariée embauchée en 2001, puis licenciée en 2006, en a réclamé le remboursement à la société vendeuse.
Celle-ci n’ayant pas donné suite à cette demande, la société cessionnaire a assigné l’ancien gérant liquidateur, tant à titre personnel qu’en sa qualité de représentant de la société vendeuse.
Ayant été déboutée de ses demandes par un Arrêt de la Cour d’Appel de POITIERS du 26 juin 2012, la société cessionnaire se pourvut en Cassation.
La Cour de cassation va rejeter le premier moyen soumis à sa décision, tiré de la constatation opérée par la Cour d’Appel de la clôture des opérations de liquidation et de leur publication.
Mais la Haute Cour va accueillir le deuxième moyen présenté à sa censure.
Tout d’abord au visa de l’article L 237-12 du Code de Commerce, la Haute Cour relève que la Cour d’Appel pour rejeter la demande de la société cessionnaire dirigée contre l’ancien liquidateur de la société, retient que la clôture des opérations de liquidation amiable de la société cédante est intervenue le 17 octobre 2006 sans que préalablement la société ait été informée d’une éventuelle créance de la société cessionnaire à son égard, un premier courrier d’information lui ayant été adressé le 23 juillet 2007 à un moment où la société cessionnaire n’avait pas informé la société vendeuse de la saisine du Conseil des Prud’hommes par l’ancienne salariée au mois d’août 2006 et qu’en conséquence aucune faute du liquidateur amiable n’était démontrée, dès lors qu’il ne pouvait prendre en compte pour l’inscrire au passif de la société vendeuse, une dette qui n’existait pas à la date de clôture des opérations de liquidation.
Censurant ce raisonnement, la Haute Cour décide qu’en se déterminant ainsi sans rechercher si le liquidateur avait eu connaissance à l’occasion du suivi du litige avec l’ancienne salariée de l’instance engagée par celle-ci au mois d’août 2006 avant la clôture des opérations de liquidation de la société vendeuse, de sorte qu’il était tenu, dès la naissance de ce litige de constituer une provision dans les comptes liquidatifs, la Cour d’Appel n’a pas donné de base légale à sa décision.
Par ailleurs, au visa de l’article L 223-1 du Code de Commerce, la Cour énonce que les associés de Société à Responsabilité Limitée supportent les dettes sociales à concurrence de leurs apports et qu’après la clôture de la liquidation de la société, l’ancien associé est tenu à l’égard des créanciers sociaux dans la mesure de ce qu’il a pu percevoir indûment à l’occasion des opérations de partage.
Relevant que pour rejeter la demande de la société cessionnaire à l’encontre du liquidateur en sa qualité d’ancien associé de la société vendeuse, la Cour d’Appel retient que la clôture des opérations de liquidation amiable de la société était intervenue sans que préalablement elle ait été informée d’une éventuelle créance de la société cessionnaire à son égard et qu’en conséquence aucune faute de l’ancien associé n’est démontrée dès lors qu’il ne pouvait prendre en compte, pour l’inscrire au passif de la société cédante, une dette qui n’existait pas à la date de clôture des opérations de liquidation.
La Haute Cour énonce qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher si les sommes perçues par l’associé au titre de la reprise de ses apports et du boni de liquidation dont elle constatait la répartition permettaient à celui-ci de s’acquitter de la dette sociale dont le paiement lui était demandé, la Cour d’Appel n’a pas donné de base légale à sa décision.
Par suite, la Cour casse et annule l’Arrêt de la Cour d’Appel sur les points visés ci-dessus.
Christine MARTIN
Associée
Vivaldi-Avocats