Source : Civ. 1re, 8 nov. 2017, n° 16-18.859
Par une décision du 8 novembre 2017, la première chambre civile a cassé un jugement d’une juridiction de proximité ayant rejeté le principe de la facturation de la fourniture d’eau potable aux motifs que : « la loi nouvelle ne s’applique pas aux conditions d’un acte juridique conclu antérieurement et que, même si elle est d’ordre public, cette loi ne peut frapper de nullité les actes définitivement conclus avant sa promulgation ».
La loi visée par la motivation est celle sur l’eau et les milieux aquatiques n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 qui prescrit explicitement aux communes de mettre fin aux conventions antérieures prévoyant la fourniture gratuite d’eau.
En ce sens, l‘article L. 2224-12-1 du code général des collectivités territoriales pose le principe de la facturation de toute fourniture d’eau au tarif applicable à la catégorie d’usagers correspondante, quel qu’en soit le bénéficiaire, à l’exception des services de lutte contre les incendies.
Très logiquement, la Cour de cassation casse et annule le jugement par un considérant à la motivation aussi concise que limpide :
« la loi nouvelle enjoint expressément aux communes de mettre fin, à compter du 1er janvier 2008, aux stipulations contraires à l’obligation de facturation de la fourniture d’eau qu’elle édicte, de sorte qu’elle s’applique aux effets futurs des contrats conclus antérieurement à son entrée en vigueur, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés »
Il faut se garder de la tentation de classer cette jurisprudence dans les cas d’espèce isolés résultant de simples conventions résiduelles. Le législateur a, à l’occasion de l’adoption de la loi de l’eau et les milieux aquatiques, souhaité mettre fin aux pratiques de livraison gratuite d’eau qui, loin de ne concerner les seuls particuliers, a largement profité aux administrations, et entités publiques.
Dans son rapport sur le projet de loi sur l’eau et les milieux aquatiques[1], le rapporteur de la commission des affaires économiques relevait avec humour que certaines institutions publiques comme le Conseil d’Etat ou le Conseil constitutionnel ne paient pas l’eau qu’elles consomment, en vertu de décrets impériaux…Si les prestigieuses institutions républicaines ne sont pas nécessairement les plus dispendieuses dans leur consommation, la récurrence de ces droits à l’eau gratuite était en revanche susceptible de créer un manque à gagner plus important pour les gestionnaires locaux de distribution d’eau.
Harald MIQUET
Vivaldi Avocats
[1] Rapport n° 271 (2004-2005) de M. Bruno SIDO, fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 30 mars 2005