L’indemnité forfaitaire de recouvrement dans un contrat de prêt est une clause pénale

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

 

Source : Cass. com., 4 mai 2017, n°15-19.141, F-P+B+I

 

I – En l’espèce

 

Une banque a formé un pourvoi contre un arrêt d’appel confirmant la minoration du montant de l’indemnité de recouvrement prévue au contrat de prêt, et rejetant sa demande tendant à la condamnation de l’emprunteuse à lui payer une indemnité excédentaire.

 

Selon la banque, la clause du contrat n’avait pas pour objet de faire assurer par l’une des parties l’exécution de son obligation, excluant dès lors toute qualification de clause pénale, et, partant, toute possibilité pour le juge de la modérer.

 

Autrement dit, pour la banque, il ne s’agissait pas d’une sanction, mais de couvrir les frais de recouvrement. Ce n’est pas le point de vue de la Cour de cassation, qui l’analyse comme une clause pénale, c’est-à-dire une sanction prévue à l’avance susceptible d’être contrôlée et modifiée par le juge.

 

En cas de défaillance dans le remboursement d’un prêt immobilier, la justice contrôle que toutes les sanctions financières réclamées par la banque ne forment pas un total déraisonnable. C’est ici une nouvelle illustration.

 

II – La clause pénale dans le contrat de prêt  

 

Qu’est-ce qui constitue une clause pénale dans le contrat de prêt, susceptible d’être réduite par le juge ? Pour répondre à cette question, il faut partir de la définition juridique de la clause pénale : l’article 1226 du Code civil dispose que « La clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l’exécution d’une convention, s’engage à quelque chose en cas d’inexécution. »

 

Plus précisément, la Cour de cassation l’a définie comme une clause par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d’avance l’indemnité à laquelle donnera lieu l’inexécution de l’obligation contractée[1]. Autrement dit encore, la clause pénale prévoit dans un contrat que le débiteur, s’il manque à son engagement ou l’exécute avec retard, devra verser au créancier une somme d’argent dont le montant, fixé à l’avance, est indépendant du préjudice causé.

 

Les critères déterminants d’une clause pénale sont donc :

 

– Son caractère comminatoire : elle énonce une menace de sanction en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution contractuelle. Elle force son débiteur à exécuter ses obligations contractuelles ;

 

– Son caractère automatique : un préjudice n’a pas à être nécessairement caractérisé, seule la constatation objective de la mauvaise ou de l’inexécution du contrat suffit à rendre la clause pénale exigible ;

 

– Son caractère déterminé ou déterminable : le montant des dommages-intérêts, ou à tout le moins son mode de calcul, est fixé à l’avance par les parties.

 

Partant, la jurisprudence a pu qualifier de clause pénale :

 

– Le taux d’intérêt contractuel majoré en cas de défaillance de l’emprunteur, la Haute juridiction ayant précisé récemment que l’augmentation de taux, de l’ordre de 75 %, voire 100 %, par rapport à un taux conventionnel de base, excède notablement le coût de refinancement de la banque, et est sans commune mesure avec le préjudice résultant pour elle du retard de paiement[2] ;

 

A l’inverse, n’est pas une clause pénale :

 

– L’indemnité mise à la charge de l’emprunteur par le contrat de prêt immobilier, en cas de remboursement anticipé[3].

 

À ne pas oublier : l’exécution d’une clause pénale impose au préalable une mise en demeure de son débiteur.

 

Thomas LAILLER

Vivaldi-Avocats


[1] Cass. civ. 1ère, 10 oct. 1995, n°93-16.869, publié au bulletin

[2] Cass. com., 5 avril 2016, n°14-20169, F-P+B

[3] Cass. civ. 1ère, 29 juin 2016, n°15-16945, F-D

 

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