Des actes d’immixtion dans l’activité d’une société ne sont pas suffisants pour caractériser la gérance de fait.

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

 

SOURCE : Cass com., 23 septembre 2014, Arrêt n° 837 FS-D (n° 12-35.120).

 

Une EURL avait signé avec une société spécialisée dans la fabrication et la distribution de produits cosmétiques deux contrats, l’un de location gérance lui permettant d’exploiter le fonds appartenant au distributeur, et l’autre de distribution exclusive lui permettant d’écouler les produits du distributeur sous l’enseigne de la marque.

 

Cette EURL ayant été déclarée en liquidation judiciaire, son liquidateur faisait assigner le distributeur aux fins de le faire condamner au paiement de diverses sommes au titre du comblement de l’insuffisance d’actif, considérant que celui-ci s’était comporté en gérant de fait et avait commis de nombreuses fautes de gestion à l’égard de l’EURL.

 

Saisie de cette affaire, la Cour d’Appel de LYON, dans un Arrêt du 25 octobre 2012, soulignant que les Juridictions Prud’homales avaient consacré la fictivité de la structure sociale désignée comme gérante du fonds et l’existence d’un lien de subordination entre la gérante de l’EURL et le distributeur, va relever que l’EURL était en présence d’un cocontractant qui s’immisçait directement dans son activité quotidienne et que ces faits manifestes d’immixtion sont suffisants à caractériser une gestion de fait et qu’en ayant soutenu abusivement l’activité de l’EURL, le distributeur a contribué dès lors, en grande partie, à l’insuffisance d’actif et doit être tenu à en couvrir une quotité importante.

 

Ensuite de cette décision, le distributeur se pourvoit en Cassation.

 

A l’appui de son pourvoi, il reproche à l’Arrêt d’Appel d’avoir considéré qu’était caractérisée une gestion de fait de l’EURL, au motif que les contrats successivement signés entre le distributeur et l’EURL ont enfermé la gérante dans une structure contrainte découlant de son adhésion à la distribution exclusive des produits du distributeur, lui faisant obligation de travailler dans un ou plusieurs modules ou cabines de soins, en appliquant une procédure sur laquelle elle n’avait aucune prise, la privant d’autonomie quant aux campagnes publicitaires, aux aménagements du local, et à la politique des prix, ainsi que tout droit au titre de la clientèle et sur le fichier client, la soumettant en outre à un contrôle de sa comptabilité et ne lui laissant un pouvoir direct que sur la direction de l’institut de beauté, l’embauche, le licenciement et la rémunération des salariés, et sur la gestion du fonds avec tenue de la comptabilité avec une autonomie sur des bénéfices et des pertes.

 

La Chambre Commerciale va accueillir les griefs du distributeur et relever qu’en s’abstenant d’établir que le distributeur avait exercé en toute indépendance une activité positive de direction de l’EURL, la Cour d’Appel n’a pas donné de base légale à sa décision, de sorte que la Haute Cour casse et annule l’Arrêt rendu dans toutes ses dispositions.

 

Christine MARTIN

Associée

Vivaldi-Avocats

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