SOURCE : Cass. Soc., 12 mars 2014, Arrêt n° 658516 FS-P + B (n° 12-22.901).
Dans une espèce où un salarié avait été recruté le 1er septembre 2008 en qualité de Directeur Général d’une entreprise industrielle, une procédure de licenciement pour motif économique fut engagée à son égard.
Conformément aux dispositions légales, l’entreprise proposait donc au salarié, dans le cadre de la procédure de licenciement, un contrat de transition professionnelle (dispositif aïeul de l’actuel contrat de sécurisation professionnelle) que celui-ci acceptait, de sorte que le contrat de travail était alors rompu d’un commun accord entre les parties.
Pour autant, contestant cette mesure de licenciement et notamment les motifs économiques avancés à l’appui de son licenciement, le salarié saisissait le Conseil des Prud’hommes de ROUBAIX demandant le paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts.
Débouté par les Premiers Juges, il interjette appel et c’est ainsi que la Cour d’Appel de DOUAI dans un Arrêt du 31 mai 2012, considérant, pour sa part, que la rupture d’un commun accord entre les parties, provoquée par l’acceptation du salarié du contrat de transition professionnelle, constituait en réalité une « fiction juridique » en ce que jamais le salarié en cause n’aurait envisagé la rupture d’un commun accord du contrat de travail s’il ne s’était pas trouvé sous la menace d’un licenciement économique et que, dès lors, cette circonstance ne pouvait l’empêcher de contester la pertinence du motif économique ou la réalité, le sérieux et la loyauté des recherches de reclassement.
Ensuite de cette décision, l’employeur se pourvoit en Cassation.
A l’appui de son pourvoi, la société fait grief à l’Arrêt d’Appel, d’une part, d’avoir dit que le licenciement était sans cause réelle ni sérieuse, alors que l’adhésion à un contrat de transition professionnelle s’analysant en une rupture d’un commun accord, le salarié n’était plus recevable à contester, sauf fraude ou vice du consentement, la légitimité d’un licenciement pour motif économique qui n’a pas eu lieu, et d’autre part d’avoir considéré que l’employeur ne pouvait démontrer avoir mené de vaines recherches pour reclasser son salarié par la production d’éléments postérieurs aux faits, la preuve de l’impossibilité du reclassement étant libre.
Mais la Haute Juridiction ne va pas entendre les arguments de l’employeur et, considérant que la Cour d’Appel a exactement retenu que si l’adhésion d’un salarié à un contrat de transition professionnelle entraîne une rupture qui est réputée intervenir d’un commun accord, elle ne le prive pas de la possibilité d’en contester le motif économique et après avoir constaté que l’employeur ne donnait pas d’indication sur l’éventualité de l’existence d’un poste disponible dans une filiale, ce dont il résultait qu’il n’avait pas satisfait de manière loyale et sérieuse à son obligation de reclassement, de sorte que la Cour d’Appel a pu en déduire à bon droit que le licenciement était sans cause réelle ni sérieuse.
Par suite, la Cour de Cassation rejette le pourvoi.
Il faut retenir de cet arrêt que l’acceptation par le salarié dans le cadre d’une procédure de licenciement pour motif économique d’un dispositif de reclassement (CTP, CRP, CSP) entrainant la rupture du contrat de travail « d’un commun accord », ne l’empêche pas de contester ensuite le motif économique ayant motivé la procédure, cette question ayant donné lieu à controverse de la part des juges du fonds, réglée par l’arrêt de la Chambre sociale du 5 mars 2008 rendu en matière de convention de reclassement personnalisé, reprenant ainsi la solution adoptée en matière de convention de conversion.
Christine MARTIN
Associée
Vivaldi-Avocats