Source : Cass. com., 15 novembre 2017, n°16-10.504, F-P+B+I
I – Les faits
Par deux actes des 7 décembre 2009 et 22 juillet 2010, une personne physique s’est rendue caution solidaire envers un créancier en garantie du paiement de factures émises sur une société. Cette dernière ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, le créancier a assigné la caution en exécution de ses engagements. La cour d’appel ayant condamné la caution à payer certaines sommes au créancier, elle a formé un pourvoi en cassation au soutien duquel elle faisait valoir en substance :
– D’une part, que la formulation manuscrite y figurant “jusqu’au paiement effectif de toutes les sommes dues” ne permettait pas à la caution d’avoir une parfaite connaissance de la durée indéterminée de ses engagements et ne répondait pas dès lors au strict formalisme exigé à peine de nullité par les articles L. 341-2 et suivants du Code de la consommation ;
– D’autre part, qu’en cas d’engagement de caution souscrit par un seul des époux, sans l’accord exprès de l’autre, la disproportion de son engagement ne peut être appréciée que par rapport à son patrimoine et ses revenus propres, à l’exclusion des biens communs, lesquels sont hors d’atteinte du créancier.
La Cour d’appel n’a pas suivi ce raisonnement, et a condamné les cautions en paiement. La Cour de cassation a été saisie de la question.
II – L’arrêt de rejet
La Haute juridiction n’a pas été plus convaincue, et a rejeté le pourvoi aux motifs que :
– D’une part, il se déduit de la combinaison des articles L.341-2 et L.341-6, devenus les articles L.331-1 et L. 333-2, du Code de la consommation, que le cautionnement à durée indéterminée est licite ; et la mention manuscrite, relative à la durée des engagements de la caution, stipulant que le cautionnement est consenti “jusqu’au paiement effectif de toutes les sommes dues” ne modifie pas le sens et la portée de la mention manuscrite légale, de sorte que les cautionnements litigieux ne sont pas entachés de nullité ;
– D’autre part, la disproportion manifeste de l’engagement de la caution s’appréciant, selon l’article L.341-4, devenu l’article L.332-1 du Code de la consommation par rapport, notamment, à ses biens, sans distinction, les biens de la caution dépendant de la communauté doivent être pris en considération, quand bien même ils ne pourraient être engagés pour l’exécution de sa condamnation éventuelle, en l’absence du consentement exprès du conjoint donné conformément à l’article 1415 du Code civil.
III – Une solution bienvenue
La Cour de cassation rappelle que le cautionnement à durée indéterminée est bien autorisé, dès lors qu’il respecte les préconisations du Code de la consommation sur les mentions obligatoires. Pat cette décision, elle vient valider la mention « jusqu’au paiement effectif de toutes les sommes dues », que l’on retrouve fréquemment en pratique. Elle est désormais consacrée.
En outre, déclarer un cautionnement nul, au motif qu’il serait disproportionné aux biens et revenus de la caution commun en biens, en l’absence de l’accord exprès de son conjoint, était pour le coup une sanction disproportionnée pour la banque. En pareil cas, celle-ci se trouve de toute façon déjà sanctionnée, par l’impossibilité de saisir les biens communs. L’arrêt ci-commenté doit être approuvé, en ce qu’il sauve l’acte de cautionnement de règles parfois trop sévères pour les établissements de crédit.
Thomas LAILLER
Vivaldi-Avocats