Nullité, caducité et péremption dans la procédure de saisie immobilière : attention aux sanctions

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

 

Source : Cass.Civ2., 1er mars 2018, n° 16-25746, F-P+B

 

Le commandement de payer est le premier acte d’une procédure de saisie immobilière. Après sa signification au débiteur saisi, ce commandement est publié au Service de la publicité Foncière. Il acquiert alors une validité de 2 ans au cours de laquelle le jugement d’adjudication doit être publié.

 

Ce commandement peut être prorogé par voie de conclusions adressées au greffe du Juge de l’exécution.

 

Comme tout acte d’exécution, la signification du commandement de payer est interruptive de prescription.

 

Par l’arrêt commenté, la Cour de cassation vient repréciser les effets de l’annulation du commandement de payer sur la prescription.

 

I – L’arrêt.

 

Une banque fait délivrer un commandement de payer valant saisie qui sera annulé par la Cour d’appel saisi du litige au motif que celui-ci est trop imprécis dans son décompte.

 

La Cour ne s’arrête cependant pas à ce simple constat. Elle ajoute que le commandement annulé avait interrompu la prescription jusque l’arrêt de la Cour d’appel an adoptant un raisonnement par analogie avec l’article 2241 du Code civil qui précise :

 

« La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

 

Il en est de même lorsqu’elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l’acte de saisine de la juridiction est annulé par l’effet d’un vice de procédure. »

 

C’est sur ce point précis qu’est interrogée la Cour de cassation.

 

II – L’arrêt de cassation.

 

Les juges du Quai de l’horloge vont casser l’arrêt d’appel au visa de l’article 2244 du Code civil qui dispose :

 

« Le délai de prescription ou le délai de forclusion est également interrompu par une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d’exécution ou un acte d’exécution forcée. »

 

La Cour de cassation refuse donc d’appliquer un raisonnement par analogie qui ne protège que le créancier.

 

Pour ces motifs, elle précise dans son attendu que « les dispositions de l’article 2241, alinéa 2, du Code civil ne sont pas applicables aux actes d’exécution forcée, de sorte que l’annulation du commandement de payer valant saisie immobilière prive cet acte de son effet interruptif de prescription, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

 

III- Ce qu’il faut retenir.

 

Autrement dit, la Cour se borne à rappeler que les dispositions de l’article 2241 du Code civil se cantonne aux seules demandes en justice et par conséquent inapplicables aux actes d’exécution forcée. Il faut donc en déduire que le commandement de payer n’est pas un acte introductif d’instance.

 

Cela s’explique simplement, le commandement est un acte extrajudiciaire n’introduit pas une instance, mais rend uniquement le bien indisponible.

 

Aussi, il faut rapprocher cet arrêt d’un arrêt similaire évoquant la caducité du commandement de payer[1]. La sanction est ici identique. Tant la caducité que la nullité du commandement privent l’acte de ses effets interruptifs de prescription.

 

Toutefois, la solution apparait différente lorsque le l’adjudication n’a pas été publiée dans le délai de 2 ans. Une fois le commandement « périmé », il cesse de produire ses effets pour l’avenir et conserve par la même occasion son effet interruptif de prescription.[2]

 

Jacques-Eric MARTINOT

Vivaldi-Avocats


[1] Civ. 1re, 10 juill. 2014, n° 13-15.511 et Civ. 2e, 4 sept. 2014, n° 13-11.887

[2] Civ. 2e, 25 sept. 2014, n° 13-19.935

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