SOURCE : Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 3 octobre 2018, n° 17-29.022 (FS-P+B)
Une société procède au renouvellement de ses délégués du personnel et du comité d’entreprise par la voie d’un vote électronique.
Lors du processus de vote, deux salariés aux motifs qu’elles n’étaient pas à l’aise avec l’informatique ont délibérément transmis à une candidate leur clé de vote. Les salariées attestent auprès de l’employeur le fait qu’elles n’ont pu voter personnellement. Dès lors, ce dernier a sollicité l’annulation des élections.
Le tribunal d’instance d’Évry considère, dans un jugement en date du 30 novembre 2017, qu’il n’y a pas lieu d’annuler les élections aux motifs que :
– D’une part, il n’y a aucune fraude dans la mesure où les salariés avaient été informés du caractère personnel et confidentiel du vote. L’absence de fraude est retenue dans la mesure où l’employeur avait en vertu du protocole électorale mis en place tous les moyens nécessaires pour aider les salariés ayant des difficultés avec le matériel informatique ;
– D’autre part, que l’irrégularité relevée n’était pas de nature à fausser les résultats de l’élection.
La Cour de cassation casse et annule la décision rendue, au visa des articles L 2314-21 et L-2324-19 du Code du travail dans un attendu de principe :
« Le recours au vote électronique pour les élections professionnelles, subordonné à la conclusion d’un accord collectif garantissant le secret du vote, ne permet pas de déroger aux principes généraux du droit électoral. L’exercice personnel du droit de vote constitue un principe général du droit électoral auquel seul le législateur peut déroger. »
La solution de la Haute Juridiction permet de rappeler les règles élémentaires à respecter en matière de vote électronique pour les élections professionnelles et plus particulièrement la confidentialité du vote par l’attribution de moyens d’identification personnel de chaque salarié. (Soc. 27 févr. 2013, n° 12-14.415 ; 14 nov. 2013, n° 13-10.519 et Soc. 14 déc. 2015, n° 15-16.491 ; Soc. 21 sept. 2016, n° 15-60.491)
Ainsi, l’employeur qui organise les élections professionnelles au moyen d’un vote électronique reste seul responsable de la violation des prescriptions relatives à la confidentialité de ce vote (CE 11 mars 2015, req. n° 368748).
Par conséquent, la Cour de cassation considère qu’en vertu des principes généraux du droit électoral, le vote par procuration qu’il soit tacite ou exprès, porte atteinte à l’exercice personnel du droit de vote.
L’employeur est donc parfaitement en droit de demander l’annulation du scrutin lorsqu’il est informé ou a connaissance de cette pratique. On ne saurait même lui conseiller en tant que garant du bon déroulement du processus électoral de solliciter l’annulation des élections professionnelles dans une telle situation.
Thomas T’JAMPENS
Vivaldi-Avocats