Source : Cass. civ. 2ème, 28 septembre 2017, n°16-17.010, F-P+B
I – Les faits
Un créancier a diligenté une saisie immobilière à l’encontre d’un débiteur, obligeant un établissement de crédit a déclaré sa créance inscrite sur le bien saisi. Lors de l’audience d’orientation, les débiteurs ont contesté la validité de cette déclaration de créance, au motif que la dette n’était ni exigible, ni chiffrée avec précision par un décompte actualisé au jour de la déclaration de créance. Le juge de l’exécution comme la cour d’appel ont annulé la déclaration de créance de la banque. Cette dernière a saisi la Cour de cassation d’un pourvoi.
II – L’arrêt de cassation
A peine de déchéance du bénéfice de leur sûreté pour la distribution du prix de vente de l’immeuble, les créanciers doivent déclarer dans le délai de deux mois à compter de la dénonciation du commandement de payer valant saisie, les créances inscrites sur le bien saisi en principal, frais et intérêts échus, avec indication du taux des intérêts moratoires, par acte d’avocat déposé au greffe du juge de l’exécution et accompagné d’une copie du titre de créance et du bordereau d’inscription. La partie poursuivante notifie, dans les deux mois suivant la publication du titre de vente, une demande de déclaration actualisée des créances aux créanciers inscrits ainsi que, si elle en a connaissance, aux créanciers énumérés à l’article 2375 du Code civil (créances privilégiées sur la généralité des immeubles : frais de justice, salaires des gens de service, etc.).
Au visa de ces principes procéduraux, la Cour régulatrice casse l’arrêt d’appel, pour dire qu’à peine de déchéance du bénéfice de sa sûreté, tout créancier inscrit doit déclarer sa créance, peu important qu’elle ne soit pas exigible et que le décompte de sa créance ne soit pas actualisé au jour même de sa déclaration.
III – Un peu de souplesse dans une procédure déjà très formaliste
La Cour de cassation estime ainsi que la lecture des articles L.331-2, R.322-7, R.322-12 et R.332-2 du Code des procédures civiles d’exécution ne révèlent à aucun moment l’obligation de justifier d’une créance exigible, et chiffrée avec exactitude au jour de la déclaration de créance (même si les textes évoquent tout de même « une créance actualisée »).
La solution doit être approuvée, car l’excès de rigueur dont ont fait preuve les juges du fond sur cette question, en posant des exigences non prévues par les textes, dénaturait complètement l’esprit de ces derniers. Ils visent en effet à protéger les créanciers inscrits sur le bien saisi, d’abord par une information délivrée par le créancier poursuivant (dénonciation de commandement), et une obligation pour le créancier inscrit de déclarer avec précision sa créance, dans un délai imparti. Sauf à ce que la déclaration de créance soit particulièrement lapidaire, ce qui est rarement le cas pour les banques, il n’y avait pas lieu de créer des difficultés là il n’y en avait pas.
La notion de créance actualisée doit être relativisée, car il n’est pas rare en pratique de produire des décomptes de créance qui ne sont pas nécessairement à jour des actes de procédure, les intérêts postérieurs étant réservés « pour mémoire ».
Thomas LAILLER
Vivaldi-Avocats