Il appartient à Caution de prouver la disproportion et au Juge et au juge du fond d’apprécier sa qualité d’avertie !

Jacques-Eric MARTINOT
Jacques-Eric MARTINOT - Avocat

 

Source : Cass.Com., 13 septembre 2017, n° 15-20294, n°1126 P + B + I

 

I – Les faits.

 

Une Banque octroie un prêt à une société et obtient en garantie le cautionnement de la compagne du gérant dans la limite de la somme de 480.000 €, en principal, pénalités et intérêts de retard.

 

La liquidation judiciaire de la Société conduira le créancier non seulement à déclarer sa créance, mais surtout à assigner la Caution en exécution de son engagement.

 

II – La procédure.

 

La caution s’appuiera sur le contentieux « classique » de la caution à travers deux arguments : un défaut au devoir de mise en garde et le caractère disproportionné de l’engagement de caution.

 

En effet, elle reproche à la Banque de na pas s’est informée sur sa situation patrimoniale conduisant aujourd’hui à une disproportion de l’engagement.

 

La Cour d’appel ne fera pas droit aux argumentations soulevées par la Caution qui formera un pourvoi.

 

La Cour de cassation saisie du litige précisera dans un premier temps que :

 

« Si l’article L. 341-4, devenu L. 332-1 et L. 343-3, du code de la consommation, interdit à un créancier professionnel de se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation, ce texte ne lui impose pas de vérifier la situation financière de la caution lors de son engagement, laquelle supporte, lorsqu’elle l’invoque, la charge de la preuve de démontrer que son engagement de caution était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus ; »

 

« Que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation des éléments de preuve produits que la cour d’appel, après avoir relevé que Mme X… ne verse aux débats aucune pièce relative à sa situation financière et patrimoniale en 2005, a retenu l’existence et l’importance des biens et revenus de cette dernière au jour de son engagement en se fondant sur la fiche de renseignement préalablement remplie par M. Y… et en a déduit que son engagement de caution n’était manifestement pas disproportionné par rapport à ses biens et revenus ; »

 

Mais également :

 

« Attendu que pour condamner Mme X… à payer à la banque la somme de 120 102,94 euros, outre intérêts, et rejeter ses demandes de dommages-intérêts fondées sur le manquement de la banque à son devoir de mise en garde, et de compensation, l’arrêt retient, par motifs adoptés, que Mme X…, attachée de direction, devait, au regard de ses compétences professionnelles, être considérée comme une caution avertie et qu’elle ne pouvait se méprendre sur ses obligations ;

 

Qu’en se déterminant par ces motifs qui, faute de préciser de quelles compétences il s’agit, sont impropres à établir que la caution était avertie, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision »

 

III – Ce qu’il faut retenir.

 

La Cour de cassation cassera l’arrêt d’appel à l’appui de l’argumentaire développé sur le caractère averti de la Caution.

 

1/ Deux points seront immédiatement précisés par la Cour :

 

– C’est à la Caution de démontrer la disproportion et ;

 

– Le texte ne met pas à la charge de la Banque de vérifier la solvabilité de la Caution, et que dans son pouvoir d’appréciation, la Cour d’appel a pu retenir l’absence de disproportion.

 

La réalité est tout autre. S’il appartient effectivement à la Caution de démontrer la disproportion, il sera toujours reproché à l’établissement bancaire de ne pas produire la fiche patrimoniale complétée lors de la souscription.

 

Il n’est pas inutile de rappeler que la Banque n’a pas à vérifier la véracité des déclarations faites sur cette fiche qui comporte la mention « sincère et véritable ».

 

Aussi bien, il est nécessaire de rappeler que la disproportion s’apprécie au jour de la conclusion du contrat, mais également au jour où la Caution est appelée.

 

S’il existe une disproportion, alors la Banque doit démontrer, au jour où la Caution est appelée, que la disproportion n’est plus. La charge de la preuve s’inverse dans ce cas particulier d’où l’intérêt pour la Banque de produire la fiche patrimoniale.

 

2/ La Cour de cassation censure les juges du fond sur l’argumentaire relatif à la qualité de caution avertie. En effet, les juges du fond seront censurés faute pour eux d’avoir précisés les compétences de la caution lui permettant d’être qualifié de Caution avertie.

 

Il y a donc une absence de base légale à la décision.

 

Il est donc nécessaire, pour démontrer la qualité de caution avertie, de préciser avec minutie les compétences de la Caution.

 

Jacques-Eric MARTINOT

Vivaldi Avocats

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