L’article L.713-5 du Code de la propriété intellectuelle prévoit une règle dérogatoire en matière de contrefaçon pour les marques de renommée, en ces termes :
« La reproduction ou l’imitation d’une marque jouissant d’une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l’enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière ».
Ainsi, contrairement aux autres marques, pour que l’atteinte à une marque renommée soit caractérisée, il suffit que le degré de similitude entre les signes en litige conduise le public concerné à établir un lien entre eux, sans qu’il soit nécessaire de rapporter la preuve d’un risque de confusion, notamment à raison de la similitude des produits ou services visés.
La Cour de cassation a entendu préciser, semble t’il pour la première fois, le sens du texte précité dans un arrêt en date du 12 avril 2016.
Au cas particulier, la Haute juridiction était saisie d’une affaire en contrefaçon, concurrence déloyale et parasitisme initiée par la société Maisons du monde, titulaire de la marque semi-figurative renommée « Maisons du monde » à l’encontre de la société Gifi, laquelle exploitait des magasins vendant des articles d’art de la table, d’ameublement et de décoration, sous l’intitulé « tout pour la maison », surmonté du dessin d’une petite maison stylisée.
La Cour d’appel de Bordeaux avait conclu à l’absence de contrefaçon, dès lors qu’il n’existait aucun risque d’assimilation entre les deux marques en cause, compte tenu de leurs différences visuelles, phonétiques et de conception, leurs conférant une impression globale différente pour le consommateur moyen, l’existence de certaines ressemblances à caractère mineur n’étant pas susceptible de créer un risque de confusion ou d’assimilation.
La Haute juridiction a cassé cette décision, aux termes d’un attendu de principe rédigé comme suit :
« Attendu que la protection conférée aux marques jouissant d’une renommée n’est pas subordonnée à la constatation d’un risque d’assimilation ou de confusion ; qu’il suffit que le degré de similitude entre une telle marque et le signe ait pour effet que le public concerné établit un lien entre le signe et la marque ».
La Cour de cassation s’inscrit ainsi dans la lignée de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union Européenne établie depuis 2008, laquelle retient que le lien entre la marque renommée et la marque postérieure suspectée de contrefaçon existe lorsque cette dernière évoque la marque antérieure dans l’esprit du consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.
Virginie PERDRIEUX
Vivaldi-Avocats