Virement bancaire et responsabilité de la banque en cas de mauvaise exécution

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

 

Source : Cass. com., 24 janvier2018, n°16-22.336, FS-P+B+I

 

I – Le texte en question

 

Selon l’article L 133-21 du Code monétaire et financier, en ses alinéas 1 et 2, un ordre de paiement exécuté conformément à l’identifiant unique fourni par l’utilisateur du service de paiement est réputé dûment exécuté pour ce qui concerne le bénéficiaire désigné par l’identifiant unique. Si l’identifiant unique fourni par l’utilisateur du service de paiement est inexact, le prestataire de services de paiement n’est pas responsable de la mauvaise exécution de l’opération de paiement.

 

II – L’espèce

 

Une société donne à sa banque un ordre de virement vers le compte d’une entreprise, ouvert dans les livres d’une autre banque. L’identifiant fourni par la société étant inexact, la somme est virée sur le compte d’un tiers. La banque de la société donneur d’ordre rembourse à celle-ci la somme virée, et demande des dommages-intérêts à la banque de l’entreprise sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle, lui reprochant d’avoir commis une faute.

 

Au visa de l’article L 133-21 du Code monétaire et financier, une cour d’appel condamne cette banque, retenant qu’en ne recherchant pas si l’identifiant unique du virement dont elle était réceptrice coïncidait avec le numéro de compte de l’entreprise désignée comme bénéficiaire, elle a commis une faute à l’origine directe et exclusive du dommage subi par la banque du donneur d’ordre qui a dû rembourser le montant du virement à sa cliente.

 

La banque condamnée a saisi la Cour de cassation d’un pourvoi.

 

III – L’arrêt de cassation

 

La Haute Juridiction censure la décision des juges du fond. Dès lors que l’ordre de virement litigieux avait été exécuté en utilisant l’identifiant unique fourni par le donneur d’ordre à sa banque et transmis par celle-ci à la banque du bénéficiaire désigné, cette dernière n’était pas responsable de la mauvaise exécution de l’opération.

 

Cette jurisprudence est inédite. La Cour de cassation applique stricto sensu l’article L 133-21 du Code monétaire et financier à un virement affecté d’une erreur sur l’identifiant du bénéficiaire, commise par le donneur d’ordre, peu importe que la banque bénéficiaire des fonds était la seule à pouvoir déceler une anomalie apparente et manifeste, et à devoir refuser le paiement fait au profit d’une personne dont les coordonnées bancaires étaient inexactes. Autrement dit, tout le risque pèse sur la banque donneur d’ordre.

 

Cet article est issu de la transposition de la directive européenne 2007/64/CE sur les services de paiement. Avant cette transposition, la Cour de cassation avait jugé que la banque réceptionnaire d’un ordre de virement, même électronique, ne pouvait pas se borner, avant d’en affecter le montant au profit d’un de ses clients, à un traitement automatique sur son seul numéro de compte, sans vérifier le nom du bénéficiaire, dès lors qu’il était inclus dans les enregistrements reçus du donneur d’ordre, et qu’il n’avait pas été exclu de tout contrôle avec l’assentiment de ce dernier[1]. Les choses seront désormais plus simples pour les banques bénéficiaires.

 

Thomas LAILLER

Vivaldi-Avocats

 


[1] Cass. com., 2 novembre 2016, n°15-12.325 F-D

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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