Tour d’horizon du dispositif d’abattement fixe des dirigeants partant en retraite

Eric DELFLY
Eric DELFLY - Avocat associé

Sources : Loi de finance 2022

 

L’article 151-O D ter du Code Général des Impôts (ci-après : « le Texte ») fait bénéficier, au titre du calcul des plus-values sur les biens meubles corporels, d’un abattement fixe applicable aux gains de cession de titres de PME réalisés par le dirigeant, lors de son départ à la retraite (ci-après : « le Dispositif »).

 

Ce Dispositif, dont les effets sont prolongés par la LF 2022 jusqu’au 31 décembre 2024,  n’est pas nouveau puisqu’il est issu, pour la première fois, de la LF 2007, dont le Dispositif a été ou prolongé et/ou modifié par les LF 2010 / 2012 / 2013 (LF rectificative) / 2014 (LF rectificative) / 2016 / 2018, c’est-à-dire que le Dispositif, à supposer qu’il ne soit pas prolongé, aura pu produire, sous diverses formes qui ont, fondamentalement, assez peu varié, un avantage fiscal pendant dix-huit ans.

 

Pour être éligible au Dispositif, le contribuable, c’est-à-dire le dirigeant d’une PME partant en retraite, doit remplir deux conditions :

 

  La première condition tenant au niveau de la participation cédée ;

 

  Le seconde tenant à la durée de la détention des titres ou des droits cédés.

 

Chronos profite de la modification du Dispositif pour procéder à un rapide rappel et tour d’horizon.

 

Etant toutefois précisé que l’abattement n’a pas varié dans le temps (500 000 €) et qu’il s’applique, si le contribuable remplit les conditions qui seront ci-après posées, sur les modalités d’imposition des gains d’impôt sur le revenu (prélèvement forfaitaire unique ou option pour le barème progressif).

 

Pour mémoire, là encore, l’option au prélèvement forfaitaire unique (ci-après : « le PFU ») conduira à un abattement sur la seule plus-value, à l’exception des cotisions sociales de type CSG et CRDS. Ainsi, par exemple, pour une plus-value réalisée par un dirigeant éligible au Dispositif, de 1 Millions d’euros, la plus-value sera calculée sur la base de 12,5 % de 500 000 € (1 000 000 € – abattement de 500 000 €) à laquelle s’ajouteront les cotisations sociales à hauteur de     17,5 % de 1 Millions d’euros. Ainsi, dans ce schéma aménagé, le contribuable paiera-t-il 237 500 € de PFU, là où l’inéligibilité au Dispositif l’aurait conduit à payer 300 000 € de PFU.

 

I – LE DISPOSITIF ET LES CONDITIONS TENANT AU NIVEAU DE LA PARTICIPATION CEDEE

 

I – 1. En principe, une cession totale

 

Le Texte envisage comme principale hypothèse, la cession de la totalité de la participation du dirigeant, c’est-à-dire qu’elle concerne l’intégralité des actions, parts ou droits détenus par celui-ci dans la société dont les titres ou droits sont cédés.

 

La cession peut intervenir au profit d’un ou plusieurs cessionnaires, mais pour ouvrir droit à l’abattement fixe, ces cessions doivent, en principe, être réalisées à la même date et désormais … jusqu’au 31 décembre 2024, là où l’ancien Dispositif fixait la date butoir au 31 décembre 2022.

 

Cet abattement de 500 000 € ne peut intervenir qu’une fois par société, étant, à contrario, ajouté que si plusieurs PME répondent à l’éligibilité du Dispositif, le dirigeant pourra bénéficier de cet abattement de 500 000 € par société éligible.

 

I -2. Exception 1 : cession de titres ou droits échelonnée dans le temps par dérogation

 

En principe, la cession des titres ou droits cédés à une même date, dans l’hypothèse où les cessions seraient échelonnées dans le temps, qu’elle soit réalisée au profit d’un ou plusieurs cessionnaires est admise au Dispositif sous certaines conditions :

 

I – 21. Cession de titres ou droits échelonnée dans le temps lorsque la cessation des fonctions et le départ à la retraire intervienne à la même date

 

Dans cette situation, l’Administration admet, pour l’appréciation de la condition de la cession totale, de prendre en compte les cessions intervenues avant et après le départ à la retraite (ou à la cessation des fonctions) sous réserves qu’il ne s’écoule pas un délai supérieur à trente-six mois (avant la LF 2022 : vingt-quatre mois) entre la première et la dernière cession prise en compte pour déterminer si la condition de cession totale ou majoritaire est remplie.

 

I – 22. Cas de cession de titres ou droits échelonnée dans le temps lorsque la cessation des fonctions et le départ en retraite interviennent à des délais différents

 

Dans cette situation, lorsqu’il ne s’écoule pas un délai supérieur à trente-six mois (antérieurement vingt-quatre mois) entre ces  deux  derniers événements, (cessation des fonctions  et départ  à la retraite), l’Administration (tolérance administrative) admet, pour déterminer si la fonction de cession totale (ou majoritaire) est remplie, de prendre en compte, cumulativement, toute cession intervenue dans les trente-six mois précédents la cessation  des fonctions ou le départ à la retraite (dernier de ces  deux  événements) et toute cession intervenue dans les trente-six mois (avant vingt-quatre) suivant la cessation des fonctions ou le départ à la retraite (premier de ces deux événements) à la condition qu’il ne s’écoule pas  un délai supérieur à trente-six mois entre la première et la dernière des cessions échelonnées cumulativement prises en compte.

 

Ainsi, toute cession prise en compte doit être distante de moins de trente-six mois de chacun des deux événements.

 

II – CESSION DE TITRES OU DROITS DETENUS PAR L’INTERMEDIAIRE D’UNE PERSONNE INTERPOSEE

 

Lorsque le dirigeant d’une société détient des titres  ou droits de cette société par l’intermédiaire d’une personne morale interposée, c’est-à-dire une société ou un groupement relevant du régime des sociétés de personnes et dont les bénéfices sont imposés entre les  mains de ses  associés, la condition tenant à la cession totale ou partielle des titres ou droits de la société concernée, s’apprécie en tenant compte des titres ou droits détenus par le dirigeant par l’intermédiaire de cette personne interposée, les conditions tenant au cédant s’appréciant au niveau  de  l’associé, personne physique de la personne interposée et non au niveau de la personne interposée.

 

III – CAS PARTICULIER DES TITRES OU DROITS POUR PARTIE CEDEE ET POUR PARTIE APPORTEE A UNE SOCIETE SOUMISE A L’IMPOT SUR LES SOCIETES

 

Il est précisé que pour l’application du Dispositif, le cédant ne doit pas détenir directement ou indirectement des droits de vote ou des droits dans les mêmes bénéfices sociaux de l’entreprise cessionnaire.

 

Toutefois, lorsqu’à la même date, les  titres ou droits détenus par le contribuable détenant plus de 50 % des droits de vote dans la société cédée,  sont pour partie cédés et pour partie apportés à une société soumise à l’impôt sur les sociétés en échange  des titres de cette dernière,  il est admis, pour l’application des articles 1  et 5 du II à l’article 150 -D ter du CGI de prendre en compte les seuls titres ou droits cédés (dans  le respect, pour ces titres cédés du 5, du 2 de l’article 150 O D ter du CGI) à l’exclusion des titres ou droits apportés. En effet, pour ces derniers, l’apporteur ne se défait pas directement de sa participation.

 

Ainsi, le gain net résultant de la seule cession, à proprement dite, peut bénéficier de l’abattement fixe prévu au Texte si les titres ou droits cédés à l’exclusion des titres apportés, présentent plus de 50 % des droits de vote dans cette société ou en cas de la seule détention de l’usufruit de plus de 50 % des droits   dans les bénéfices sociaux de la même société, étant précisé que toutes les conditions prévues au Texte doivent, par ailleurs, être remplies.

 

Chronos n’a évidemment commenté que la partie du Dispositif impactée par la LF 2022, il est renvoyé les lecteurs aux autres conditions qui, d’une loi de finance sur l’autre, ne changent, comme la durée de détention des titres, les fonctions de direction ou la notion de PME.

 

[1] Texte 150 O D ter, modifié par la loi 2021-1900 du 30/12/2021, article 19-II et III

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