Saisie pénale des biens ou droits mobiliers incorporels : elle est conforme à la Constitution

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

 

Source : Cons. const., 14 oct. 2016, nº2016-583/584/585/586 QPC

 

Le Conseil constitutionnel a été saisi de quatre questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) relatives à la conformité à la Constitution de l’article 706-153 du code de procédure pénale relatif à la procédure de saisie pénale spéciale des biens ou droits mobiliers incorporels.

 

Cette procédure vise exclusivement à garantir l’exécution de la peine complémentaire de confiscation des biens définie à l’article 131-21 du Code pénal. Le juge des libertés et de la détention, dans le cadre d’une enquête de flagrance ou préliminaire, et le juge d’instruction, dans le cadre d’une information, peuvent autoriser pour le premier et ordonner pour le second la saisie de biens ou droits incorporels. L’ordonnance de saisie peut être contestée devant la chambre de l’instruction dans un délai de dix jours à compter de sa notification.

 

Le Conseil constitutionnel a écarté les griefs tirés de la méconnaissance du droit de propriété consacré par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, et du droit à un recours juridictionnel effectif prévu par l’article 16.

 

Il a d’abord relevé que, si la mesure de saisie a pour effet de rendre indisponibles les biens ou droits incorporels saisis, elle est ordonnée par un magistrat du siège et ne peut porter que sur des biens ou droits dont la confiscation peut être prononcée à titre de peine complémentaire en cas de condamnation pénale.

 

En deuxième lieu, toute personne qui prétend avoir un droit sur un bien placé sous main de justice peut en solliciter la restitution par requête auprès, selon le cas, du procureur de la République, du procureur général ou du juge d’instruction.

 

En troisième lieu, l’ordonnance du juge des libertés et de la détention ou du juge d’instruction autorisant ou prononçant la saisie est notifiée au propriétaire du bien ou du droit saisi et, s’ils sont connus, aux tiers ayant des droits sur ce bien ou sur ce droit qui peuvent la contester devant la chambre de l’instruction. Ces personnes, qu’elles aient fait appel ou non, peuvent par ailleurs être entendues par la chambre de l’instruction avant que celle-ci ne statue. Elles ne sont donc pas privées de la possibilité de faire valoir leurs observations et de contester la légalité de la mesure devant un juge.

 

En quatrième lieu, en ne prévoyant pas de débat contradictoire devant le juge ayant autorisé ou ordonné la saisie et en ne conférant pas d’effet suspensif à l’appel devant la chambre de l’instruction, le législateur a entendu éviter que le propriétaire du bien ou du droit concerné puisse mettre à profit les délais consécutifs à ces procédures pour faire échec à la saisie par des manœuvres. Ce faisant, il a assuré le caractère effectif de la saisie et, ainsi, celui de la peine de confiscation.

 

Enfin, le Conseil a jugé que l’absence de délai déterminé imposé à la chambre de l’instruction pour statuer sur l’appel de l’ordonnance de saisie « ne saurait constituer une atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif de nature à priver de garanties légales la protection constitutionnelle du droit de propriété ».

 

Procédure plutôt méconnue des banques, la saisie pénale peut s’avérer frustrante pour ces dernières, qui subissent en pareil cas une procédure exorbitante du droit commun les surpassant totalement. Heureusement, et comme exposées ci-avant, des voies de recours existent pour elles, aux fins de faire valoir leurs garanties utilement même lorsque le débiteur fait l’objet d’une procédure pénale.

 

Thomas LAILLER

Vivaldi-Avocats 

 

 

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