Régime d’imposition des rémunérations perçues par les associés de société d’exercice libéral (SEL) : l’administration fiscale apporte des précisions sur les conséquences de l’imposition, par principe, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC)

Caroline DEVE
Caroline DEVE - Avocat

Afin de répondre aux interrogations des contribuables suscitées par le changement de doctrine opéré en décembre 2022, l’administration publie un rescrit répondant aux principales questions relatives à l’imposition des revenus d’activité des associés de SEL dans  la catégorie des BNC

Source :BOI-RSA-GER-10-30 MAJ 27/12/2023 + rescrit du 27/12/2023

Dans le cadre de la présente newsletter, nous vous informions du changement de doctrine de l’administration fiscale au sujet des modalités d’imposition des rémunérations perçues par les associés de sociétés d’exercice libéral (SEL).

S’alignant sur la position du Conseil d’État (notamment issue de l’arrêt du CE, 8/12/2017, n°409429, mentionné dans les tables du recueil Lebon également commenté sur Vivaldi chronos), l’administration fiscale considère désormais que les rémunérations perçues par les associés de SEL doivent être imposées dans la catégorie des BNC et non dans la catégorie des traitements et salaires (TS) lorsque l’associé a un mandat social au sein de la SEL en plus de ses fonctions techniques en vertu de l’article 62 Code Général des Impôts (CGI).

Ce changement de doctrine a suscité beaucoup de questions de la part des intéressés de sorte que l’administration fiscale a précisé les points suivants :

  • En matière d’impôt sur le revenu 

Les revenus sont imposés par principe dans la catégorie des BNC sauf si l’activité est exercée dans des conditions traduisant l’existence d’un lien de subordination à l’égard de la société, auquel cas ces rémunérations sont, par exception, imposées dans la catégorie des traitements et salaires.

Les rémunérations peuvent également être imposées dans la catégorie des TS, les gérants de SELARL, lorsque les rémunérations qui sont allouées à raison de l’exercice d’une activité libérale ne peuvent pas être distinguées de celles perçues au titre des fonctions de gérant. Le contribuable doit justifier en quoi cette distinction ne peut être faite et le BOI précise que « l’absence de documents statutaires ou comptables tels que ceux fixant la rémunération accordée par la société au titre des fonctions de gérant ou mesurant le temps passé à l’exercice de ces fonctions n’est pas à elle seule de nature à caractériser une impossibilité de distinguer les rémunérations allouées au titre des fonctions de gérant de celles perçues au titre de l’exercice de l’activité libérale, et ne saurait par conséquent emporter l’imposition de la totalité des rémunérations selon les règles prévues à l’article 62 du CGI ».

L’administration fiscale admet à titre de règle pratique, qu’une part de 5 % de la rémunération d’ensemble perçue par les gérants majoritaires de SELARL au titre de leurs activités libérale et de gérance correspond aux revenus afférents à leurs fonctions de gérant, imposables dans les conditions de l’article 62 du CGI, qu’il soit possible de les distinguer ou non de la rémunération technique.

L’imposition dans la catégorie des BNC s’applique obligatoirement à compter de l’imposition des revenus 2024 (campagne de déclaration en 2025). Les associés de SEL peuvent encore pour les revenus 2023 les imposer dans la catégorie TS. Ils peuvent cependant dès l’imposition des revenus 2023 déclarer leurs revenus dans la catégorie des BNC.

L’administration fiscale indique que le régime « micro BNC » prévu à l’article 102 ter du CGI peut s’appliquer aux associés de SEL s’ils respectent les conditions d’application et notamment le seuil de chiffre d’affaires s’élevant à 77 000 €.

Le rescrit précise que pour l’appréciation du seuil d’application du régime « micro-BNC », il convient de retenir la rémunération versée par la SEL, en y réintégrant le cas échéant les dépenses professionnelles de l’associé acquittées en son nom et pour son compte par la SEL, au titre de l’année civile précédente et/ou de la pénultième année, qui auraient été déclarées dans la catégorie des BNC si elles avaient été perçues à compter de 2024.

Le rescrit rappelle en outre la jurisprudence du Conseil d’État de 2017 sus visée concernant la déduction des cotisations Madelin : elles ne peuvent être déduites du revenu imposé dans la catégorie des TS mais sont déductibles si le revenu est imposé dans la catégorie des BNC.

Le rescrit précise par ailleurs que la rémunération versée par une SEL à un professionnel associée de la SPFPL elle-même associée de la SEL, l’imposition se fait dans la catégorie des BNC.

  • En matière de TVA

L’administration fiscale indique clairement que le changement de doctrine n’a aucune incidence en matière de TVA pour l’associé de SEL imposé dans la catégorie des BNC.

La TVA est due lorsqu’un assujetti agissant en tant que tel réalise à titre onéreux une prestation de service.

Les associés de SEL n’exercent pas leur activité en qualité d’assujetti agissant en tant que tel c’est-à-dire en qualité de personne indépendante réalisant une activité économique mais au nom de la société qui, quant à elle, peut être considérée comme un assujetti en tant que tel.

La rémunération versée par une SEL à son associé est donc hors champ de la TVA.

  • En matière de cotisation foncière des entreprises (CFE)

De la même manière, l’administration fiscale indique que l’imposition des revenus des associés de SEL dans la catégorie des BNC n’aura pas d’incidence en matière de CFE puisque cet impôt est dû par le contribuable exerçant une activité dans le champ.

Or, la personne exerçant l’activité imposable est la SEL et non ses associés.

Les associés de SEL ne sont susceptibles d’être imposables que s’ils exercent par ailleurs en leur nom propre une activité professionnelle non salariée distincte de celle exercée dans la SEL (hypothèse assez rare en pratique).

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