Point sur les règles générales applicables au télétravail, hors COVID 19

Christine MARTIN
Christine MARTIN - Avocat associée

SOURCE : article L1222-9 à L1222-11 du Code du Travail et accord national interprofessionnel sur le télétravail du 19 juillet 2005, étendu par arrêté du 30 mai 2006 et modifié par arrêté du 15 juin 2006.

 

Pendant la période de déconfinement, les entreprises sont vivement encouragées à laisser, autant que possible, leurs salariés en télétravail.

 

La période du confinement ayant été l’occasion de faire l’expérience de nouvelles organisations de travail, le télétravail risque fort de s’inscrire dans la durée, de sorte qu’il paraît opportun de faire un point sur le cadre général du télétravail hors période de pandémie.

 

Les entreprises une fois sorties de l’état d’urgence auront tout intérêt à formaliser le télétravail que ce soit dans le cadre d’un accord collectif, d’une charte ou tout simplement un avenant au contrat de travail du salarié afin d’en préciser les modalités.

 

Tout d’abord, il n’est pas inutile de rappeler qu’aux termes de l’article L1222-9 § 1 du code du travail, le télétravail « est une forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait pû être exécuté dans les locaux de l’employeur, l’est hors de ses locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication. »

 

Le télétravail peut être occasionnel ou permanent, à temps partiel ou à temps complet, de sorte que tout salarié a une vocation naturelle à devenir au moins un jour un télétravailleur.

 

Le télétravail peut être mis en place dans le cadre d’un accord collectif d’entreprise, ou le cas échéant par une charte élaborée unilatéralement par l’employeur après avis du Comité Social et Economique.

 

Mais, même en l’absence d’accord collectif ou de charte, un employeur et un salarié peuvent parfaitement convenir d’une organisation du temps de travail en télétravail dans le cadre d’un avenant au contrat de travail.

 

Si un accord collectif ou une charte est établi (e), il (elle) doit préciser obligatoirement les points suivants :

 

  Les conditions de passage en télétravail et en particulier en cas d’épisode de pollution,

 

  Les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail,

 

  Les modalités d’acceptation du salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail,

 

  Les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail,

 

  La détermination des plages horaires durant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail,

 

  Les modalités d’accès des travailleurs handicapés à une organisation en télétravail.

 

Le télétravail revêt un caractère volontaire que ce soit pour le salarié ou pour l’entreprise.

 

En effet, le salarié peut être embauché directement en télétravail par l’employeur, mais il peut également passer en télétravail pendant le cours d’exécution du contrat de travail, que ce soit à sa demande ou à celle de l’employeur.

 

L’organisation du travail sous forme de télétravail constituant une modification du contrat de travail, un salarié ne saurait être sanctionné pour son refus de passer sous un mode d’organisation en télétravail, ce refus ne pouvant être un motif de rupture de son contrat de travail.

 

De son côté, l’employeur répondant de manière négative à une demande de télétravail émanant d’un salarié, doit motiver sa réponse en cas de refus dans la mesure ou l’accord d’entreprise ou la charte sur le télétravail qui prévoit des conditions d’éligibilité des salariés à ce mode d’organisation, constitue pour l’employeur un engagement d’accepter ce mode d’organisation.

 

L’accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005 prévoit la conclusion d’un avenant au contrat de travail, lequel doit prévoir une période d’adaptation pendant laquelle chacune des parties peut mettre fin au télétravail, le salarié retrouvant alors son poste initial dans l’entreprise.

 

Par ailleurs, sauf stipulation contraire de l’accord collectif ou de la charte mettant en place le télétravail, l’employeur ne peut pas modifier cette organisation contractuelle du travail sans l’accord du salarié.

 

Il est à préciser, et cette disposition a pris tout son sens pendant la pandémie liée au COVID 19, qu’en vertu des dispositions de l’article L1222-11 du Code du Travail, en cas de circonstances exceptionnelles notamment de menaces d’épidémie ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés, disposition qui constitue une entorse au principe du volontariat.

 

Il est à préciser que le télétravailleur conserve les mêmes droits que le salarié travaillant dans les locaux de l’entreprise et qu’il doit bénéficier chaque année d’un entretien portant notamment sur ses conditions d’activité et sa charge de travail.

 

L’accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005 prévoit en outre que l’employeur doit veiller au strict respect des dispositions légales et conventionnelles relatives à la santé et à la sécurité au travail, et que des mesures doivent être prises pour prévenir l’isolement du télétravailleur par rapport à sa hiérarchie et aux autres salariés.

 

Enfin, l’employeur est tenu de respecter la vie privée du télétravailleur et l’informer d’une éventuelle mise en place d’un moyen de surveillance.

 

En ce qui concerne la prise en charge des frais relatifs au télétravail, l’article L1222-10 du Code du Travail issu de l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 ne prévoit plus que l’employeur doit prendre en charge tous les coûts découlant de l’exercice du télétravail, toutefois l’article 7 de l’accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005 prévoit que l’employeur prend en charge les coûts directement engendrés par le télétravail, en particulier ceux liés aux communications.

 

A cet égard, l’URSSAF a précisé en date du 18 décembre 2019 qu’une allocation forfaitaire globale versée par l’employeur d’un montant de 10€/mois pour un salarié effectuant une journée de télétravail par semaine, de 20€/mois pour deux jours de télétravail par semaine, 30€/mois pour trois jours de télétravail par semaine, etc…, est réputée utilisée conformément à son objet et exonérée de cotisations et de contribution sociale, ces sommes constituant un seuil de tolérance fixé par l’ACOSS et l’URSSAF.

 

Enfin, le salarié bénéficie de la même protection sociale que les autres salariés de l’entreprise et bénéficie notamment de la couverture d’accident du travail en cas d’accident survenu à son domicile durant son activité de télétravail. De même il bénéficie également de titres restaurant dans des conditions équivalentes aux autres salariés.

 

Concernant la mise en place du télétravail dans le cadre de la pandémie liée au COVID 19, ainsi qu’il l’a été évoqué ci-dessus, l’employeur avait donc parfaitement la possibilité d’imposer à ses salariés le travail en télétravail.

 

Dans le cadre du déconfinement, la Ministre du Travail a mis en ligne sur le site du Ministère un jeu de questions-réponses concernant le télétravail et le déconfinement reprenant pour l’essentiel de manière simplifiée et pratico-pratique les différents aspects du télétravail tels que repris ci-dessus.

 

Il est à noter enfin que la CNIL a sorti le 12 mai 2020 une fiche pratique « conseils pour la mise en place du télétravail », principalement axée sur la sécurisation des systèmes d’information et la sécurité informatique à mettre en place dans le cadre de l’installation du télétravail, et a préconisé un certain nombre de mesures notamment d’équiper tous les postes de travail des salariés en télétravail au minimum d’un pare-feu, d’un antivirus et d’un outil de blocage d’accès aux sites malveillants.

 

Elle préconise également la mise en place d’un VPN pour éviter l’exposition directe des services de l’entreprise sur internet, et préconise l’authentification du VPN à deux facteurs si possible.

 

Elle préconise enfin de mettre à disposition des salariés une liste d’outils de communication et de travail collaboratif appropriés au travail distant qui garantissent la confidentialité des échanges et des données partagées.

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