Opérations boursières et devoir de mise en garde

Sylvie LHERMIE
Sylvie LHERMIE

  

Source : CA COLMAR 2 octobre 2013, RG n° 1 A 12/01655, Consorts NEY/ CIC EST

 

En mars 2000, Monsieur N donne l’ordre à sa banque d’acquérir « à prix d’ouverture au comptant » pour lui-même et ses trois fils des titres du troisième site internet français introduit sur le nouveau marché de la Bourse de Paris, pour un montant total de 75.000 euros.

 

Après l’engouement, le titre chute un mois plus tard.

 

La banque accorde alors à ses clients un prêt de 41.000 euros avec pour objectif « d’attendre que le cours de l’action remonte pour les vendre et rembourser par anticipation le prêt personnel ».

 

En mai 2000, la banque leur consent un nouveau prêt aux mêmes fins d’un montant de 25.700 euros.

 

En novembre 2000, ce site internet fait l’objet d’une OPE par l’un des leaders des sites internet de messagerie gratuite.

 

Le cours du titre est suspendu à la cotation.

 

Les investisseurs engagent une procédure à l’encontre de la banque visant à la voir condamner à la réparation de leurs préjudices financier et moral.

 

Les premiers juges les déboutent de leur action.

 

La Cour d’Appel de Colmar confirmera ce jugement aux motifs notamment que :

 

  • Sur le choix du placement :

 

-la convention de compte titres liant les parties ne prévoit pas de mandat de gestion de la banque ;

-l’établissement financier n’a pas la qualité de commissionnaire du croire tenue de la bonne fin de l’opération ;

-l’investisseur disposait des fonds suffisants ;

-la banque n’était pas tenue d’une obligation de mise en garde à l’égard d’investisseurs avertis ;

-ce placement ne comportait pas de risque particulier. Plus encore, la convention de comptes titres écarte tout devoir de conseil et d’information de la banque sur l’opportunité ou le risque des opérations décidées par le client.

-sa responsabilité contractuelle ne peut être engagée : elle n’a pas agi comme intermédiaire.

 

  • Sur les prêts consentis :

 

– ils ne sont pas dépourvus de cause : ils ont été consentis pour financer l’investissement déjà réalisé ;

-les dispositions du Code de la Consommation ne s’appliquent pas à des prêts d’un montant supérieur à 21.500 euros. (1) .

-l’absence de bonne foi et de loyauté de la banque n’est pas établie ;

-le montant des prêts accordés n’est pas disproportionné eu égard à la situation patrimoniale des emprunteurs.

 

Les investisseurs formeront peut-être un pourvoi en cassation à l’encontre de cette décision de la Cour d’Appel de Colmar.

 

On ne pourrait que les en dissuader : cette obligation de conseil qui bénéficie aux non-professionnels ne concerne que les ordres complexes à l’exclusion des ordres simples.

 

Il nous appartiendra de vous tenir informés.

 

En tout état de cause, il leur est rappelé qu’ils doivent assumer leur choix dans l’opération de placement ainsi réalisée.

 

Sylvie LHERMIE

Vivaldi-AVOCATS


 

[1] actuellement le seuil est de 75.000 euros.

 

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