Organisation internationale du patrimoine

François ALMALEH
François ALMALEH

 

 

Face à de plus en plus de contraintes fiscales, l’adage que l’herbe est plus verte ailleurs devient plus présent dans les réflexions d’investisseurs, d’entreprises, voire même de cadres supérieurs ou de retraités. En effet, un des moyens de faire progresser son pouvoir d’achat, en l’absence de nouvelles ressources, est celui de comprimer les charges… y compris fiscales. Cela est à certains égards évident mais la réalisation pratique n’est pas si simple… en France.

 

L’on peut arriver à des objectifs « internationaux » en étant mobile, parce que le monde à ce jour le permet (sans que cela ne soit nécessaire, quoique parfois il l’exige). Cette mobilité est celle d’ajuster des contraintes par d’autres éventuelles, mais en en retirant un bénéfice (gain fiscal, diversification positive, charges réduites,…).

 

Le patrimoine est globalement composé de finances, de bien professionnel et d’immobilier. Analysons par catégorie les impacts d’une organisation internationale conduisant à voir au-delà de nos frontières.

 

 

A) La finance

 

Si l’on peut considérer ce type de patrimoine comme étant liquide, et transférable facilement d’un pays à l’autre, tant que l’on est résident français, cela n’a pas beaucoup d’intérêt d’un point de vue strictement fiscal. L’on est imposé sur son patrimoine mondial. Sur le plan de l’organisation stricto sensu, un compte titres en France ou à l’étranger n’a d’intérêt que si la société de gestion en tant que telle à l’étranger est très performante, mais la France est suffisamment bien pourvue sur ce sujet, aussi avec plus de 30 000 opcvm disponibles de plus de 300 sociétés de gestion internationales. La surperformance d’un portefeuille parce qu’il serait géré en Suisse, au UK, au Luxembourg n’est pas prouvée à ce jour face à des actifs placés en France. L’on aurait peut-être la qualité de la gestion alternative (hedge funds) mais cela ne concerne qu’une frange experte d’investisseurs patrimoniaux.

 

 En assurance-vie, le placement préféré des français (en dehors des livrets naturellement) , les contraintes sont plus importantes chez nous qu’ailleurs : en Suisse, au Luxembourg, en Belgique par exemple, l’ouverture à toutes les sociétés de gestion est la règle et aussi à toutes catégories de placement (gestion alternative, private equity, non-coté, …). Les coefficients de dispersion des actifs sont plus souples. Les mandats de gestion peuvent être confiés à plusieurs gérants si nécessaire, selon les capitaux en jeu. Les reportings sont globalement plus riches d’informations pour contrôler les risques et les performances.

 

Avec les accès internet, cela ne pose aucune difficulté à faire gérer ses fonds à l’étranger et à suivre leur évolution. Quant au conseiller, qui quoi qu’il en soit sera dans le cadre d’un mandat de gestion globalement standardisé, un point trimestriel ou semestriel serait suffisant.

 

 

B) L’immobilier

 

L’imposition des revenus étant de source mondiale, l’intérêt de détenir des biens immobiliers hors de France ne présente d’intérêt que pour la partie de la diversification de ces biens (vignes en Argentine, terres agricoles au Chili, ryad au Maroc, résidence en Floride…). Il est rappelé ici que l’on gère néanmoins mieux ses affaires que lorsque l’on est proche d’elles. Les conventions fiscales de non double imposition sont intéressantes uniquement lorsque, par définition, le contribuable est non-résident. Les conventions fiscales du modèle OCDE signées par la France permettent en général au pays où est situé le bien le droit d’imposer les plus values (parfois les revenus). Chaque situation nécessite un éclairage selon les conventions internationales.

 

L’on pourrait envisager une donation (déclarée en France) d’un parent à un enfant lui-même délocalisé, qui revendrait ce bien si la fiscalisation de la plus-value immobilière dans le pays concerné et selon les conventions était intéressante. Il est évident naturellement que le produit de cession ne pourrait revenir au parent donateur. L’opération doit être économique et non fiscale, d’autant moins que les dispositions sur l’abus de droit ont été revues ces jours-ci (le but exclusivement fiscal est remplacé par ‘essentiellement’ fiscal… ce qui élargi le champ d’investigation de l’administration fiscale).

 

 

C) Les biens professionnels

 

Le transfert de siège social d’une entreprise au sein l’UE est désormais facilitée sur le plan fiscal mais n’est pas si simple à mettre en œuvre quand l’outil de production n’est pas transférable. Apporter ses biens à une holding étrangère en étant résident fiscal français n’est qu’un déport du problème d’optimisation de la fiscalité… sauf à envisager à terme sa propre délocalisation.

 

Les contraintes récentes du 167 bis du CGI (exit tax) sur les opérations d’échange de titres (dont les apports en report d’imposition) limitent fortement les possibilités d’optimisation internationale, avec un report qui ne s’éteindrait pas, même après 8 ans passé à l’étranger.

 

Les biens semi-professionnels ou les participations dans des sociétés françaises ou étrangères ne sont pas optimisés s’ils étaient détenus par une holding étrangère (au Luxembourg, une soparfi par exemple). En effet, même si dans cet exemple la Soparfi optimise dividendes et plus-values, l’actionnaire français d’une telle structure pourrait être soumis à l’ISF sur des biens « professionnels », voire au 123bis du CGI :

 

« Lorsqu’une personne physique domiciliée en France détient directement ou indirectement 10 % au moins des actions, parts, droits financiers ou droits de vote dans une entité juridique – personne morale, organisme, fiducie ou institution comparable – établie ou constituée hors de France et soumise à un régime fiscal privilégié, les bénéfices ou les revenus positifs de cette entité juridique sont réputés constituer un revenu de capitaux mobiliers de cette personne physique dans la proportion des actions, parts ou droits financiers qu’elle détient directement ou indirectement lorsque l’actif ou les biens de la personne morale, de l’organisme, de la fiducie ou de l’institution comparable sont principalement constitués de valeurs mobilières, de créances, de dépôts ou de comptes courants ».

 

A l’heure d’ouverture des frontières géographiques, fiscales, politiques, économiques, nos voisins permettent beaucoup mieux une organisation internationale du patrimoine, dans une logique de cohérence, d’optimisation (naturelle) et de diversification. Pour les résidents français, les contraintes sont d’autant plus fortes qu’à l’heure de la libre circulation des biens et des personnes, ils n’en voient pas l’application concrète. La France s’isole à tel point que l’association européenne des analystes financiers a déménagé récemment de Paris à Londres. La France perd de son attrait financier. Il est donc important pour les détenteurs de patrimoine de bien définir leurs objectifs et les réponses à ces objectifs, qu’elles soient en France ou à l’étranger.

 

François ALMALEH

 

FINADOC

 

Directeur financier privé, Services financiers aux dirigeants, Gestion de fortune Conseiller en Investissements financiers

enregistré sous le n°D011865 auprès de la CNCIF, agréé AMF Orias N° 11 062 831 N° AMF : 513969642 Démarchage bancaire et financier : 2113203879HQ  RC : Chartis Europe

www.finadoc.comcontact@finadoc.com

 

Partager cet article