Nullité des assemblées postérieures à l’exclusion abusive d’un associé de SAS : encore et toujours Monsieur D’HEM

Eric DELFLY
Eric DELFLY - Avocat associé

 SOURCE : Cass. Civ 2, 26 septembre 2013, n°12-23129, F-D

 

Monsieur D’HEM est, une fois de plus, à l’honneur sur Vivaldi Chronos. Rappelons nous, une fois encore que Monsieur D’HEM avait été la malheureuse victime d’un putsch organisé par son associé minoritaire, lequel était parvenu à voter son exclusion en utilisant habilement les statuts de la SAS qui privaient du droit de vote l’associé (même le majoritaire) menacé d’exclusion.

 

La Cour de cassation, au visa des articles 1844 al 1 du code civil et L227-16 du Code de commerce, avait censuré les décisions du fond entérinant l’exclusion de Monsieur D’HEM au motif que nul associé ne peut être privé de son droit de vote[1].

 

Cette procédure mettait un terme à un long parcours du combattant qui avait commencé le 3 mai 2005 date de son exclusion pour se terminer le 13 novembre 2008, date à laquelle la Cour d’appel, statuant sur renvoi après cassation, l’avait rétabli « dans la plénitude de ses droits d’associé ».

 

Toute la difficulté est qu’en son absence forcée, les associés restant avaient pris des décisions destinées tout autant à organiser la vie sociale qu’à parer à son éventuelle réintégration. Monsieur D’HEM a donc repris son bâton de Pèlerin et saisi de nouveau les juges du fond pour obtenir l’annulation de toutes les décisions prises depuis son éviction et jusqu’à sa réintégration.

 

En réponse, ses associés objecteront que la demande d’annulation aurait du être formée en même temps que la contestation de la mesure d’exclusion. Selon eux, l’arrêt du 13 novembre 2008 réglait définitivement toutes les difficultés relatives à l’exclusion, en ce compris le sort des assemblées intervenues pendant la période d’exclusion de Monsieur D’HEM.

 

La Cour de cassation n’est pas de cet avis. Elle considère au visa de l’article 1351 du Code civil, que cette « nouvelle demande était formée sur un droit née de la décision rendue à l’issue de l’instance antérieure ».

 

La décision n’est pas publiée au Bulletin, de sorte qu’il est difficile d’en tirer les leçons qui commencent à être publiées par la doctrine.

 

En l’espèce, le pourvoi ne portait pas sur la possibilité d’obtenir l’annulation des assemblées générales intervenues au cours de la période d’exclusion, mais uniquement sur la possibilité de procéder à de telles demandes d’annulation en dehors de la procédure d’exclusion.

 

La leçon que nous devons retenir s’inscrit en 2 formules :

 

L’associé peut scinder la contestation de la mesure d’exclusion de sa demande en annulation des assemblées intervenues avant sa réintégration ;

 

La sanction semble être à tout coup la nullité puisque précisément, à raison de son exclusion illégitime, l’associé a, là encore, été privé de son droit de vote ;

 

L’affaire peut se compliquer lorsque l’associé est minoritaire. Dans ce cas, rien n’interdit au bloc majoritaire de couvrir la nullité par la convocation de l’ensemble des associés, en ce compris celui récemment réintégré, à une assemblée générale destinée à se prononcer sur la ratification de la précédente assemblée viciée. Dans une telle hypothèse, il n’est pas du tout acquis que l’action menée par ce minoritaire aurait été aussi efficace. Il est même vraisemblable que les juridictions du fond, mais également la Cour de cassation, jugerait que la nullité a été couverte par une assemblée postérieure régulière.

 

Eric DELFLY

Vivaldi-Avocats



[1] Cass.com, 23 octobre 2007, n°06-16537, Bulletin 2007, IV, N° 225

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