Notion de non-professionnel

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

  

SOURCE : 1ère civ, 2 juillet 2014, n°13-16312, Publié au bulletin

 

Un agriculteur conclut un contrat de prestation de services informatiques, renouvelable par tacite reconduction, ayant pour objet la comptabilité et la gestion de son entreprise. L’agriculteur résilie le contrat sans respecter le préavis contractuel, de sorte que le contrat est reconduit.

 

L’agriculteur ayant cessé ses règlements, est assigné par son prestataire. L’agriculteur se prévaut des dispositions du code de la consommation, considérant avoir traité comme un consommateur dans une activité dans laquelle il ne dispose d’aucune connaissance spécifique. Plus précisément, il excipe de la violation de l’article L136-1 du Code de la consommation, applicable aux non professionnels, aux termes duquel :

 

« Le professionnel prestataire de services informe le consommateur par écrit, au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu’il a conclu avec une clause de reconduction tacite.

 

Lorsque cette information ne lui a pas été adressée conformément aux dispositions du premier alinéa, le consommateur peut mettre gratuitement un terme au contrat, à tout moment à compter de la date de reconduction. (…) »

 

de sorte que le contrat est rompu depuis sa dénonciation, nonobstant le préavis.

 

Le Juge de proximité de Cherbourg partage sa position. Il considère que le contrat a « pour objet la comptabilité et la gestion de l’entreprise ; que l’agriculteur doit être considéré comme un consommateur (…) ».

 

Le juge statuait ainsi en faveur d’une notion souple de « non-professionnel » conforme à la position d’une partie de la doctrine, qui considère que le non-professionnel est le professionnel se trouvant, en dehors de sa spécialité, dans le même état d’ignorance et de faiblesse qu’un consommateur[1].

 

Cette conception n’est pas celle de la Cour de cassation, qui casse le jugement. Pour la Haute juridiction, « le texte susvisé ne s’applique pas aux professionnels ayant conclu un contrat de prestation de services en rapport direct avec leurs activités ».

 

En conséquence, lorsqu’un contrat est conclu pour les besoins de l’activité du professionnel, mais s’il n’a aucun savoir spécifique en la matière, celui-ci ne peut relever de la catégorie des non-professionnels ou consommateurs.

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats

 


[1] Beauchard J., Remarques sur le Code de la consommation, Ecrits en hommage à Cornu G., PUF, 1995, p. 9 ; Berlioz G., Droit de la consommation et droit des contrats, JCP Cl 1979, II, no 13019, JCP G 1979, I, no 2954 ; Carmet O., Réflexions sur les clauses abusives au sens de la loi no 78-23 du 10 janvier 1978, RTD com. 1982, p. 9 ; Cas G. et Ferrier D., Traité de la consommation, PUF, 1986, no 8 ; Mestre J., obs. sous Cass. 1re civ., 28 avr. 1987, no 85-13.674, RTD civ. 1987, p. 537 ; Paisant G., Les clauses abusives et la présentation des contrats dans la loi du 1er février 1995, D. 1995, chr., p. 101

 

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