Le système du quotient est applicable à la plus-value issue d’un rachat partiel de titres

Clara DUBRULLE
Clara DUBRULLE

Source : Conseil d’État, 9ème – 10ème chambres réunies, 23/11/2020, 427778, Inédit au recueil Lebon

 

A l’occasion d’un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de Mme D, l’administration fiscale a remis en cause l’application des dispositions de l’article 163-0 A du code général des impôts (système du quotient) à la plus-value de cessions de titres réalisée par elle le 19 septembre 2008.

 

Mme D se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 6 décembre 2018 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté l’appel qu’elle avait formé contre le jugement du 24 mars 2015 du tribunal administratif de Marseille rejetant sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2008 à la suite de cette rectification.

 

Le Conseil d’État rappelle les dispositions de l’article 163-0 A du CGI :

 

« Lorsqu’au cours d’une année un contribuable a réalisé un revenu qui par sa nature n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement et que le montant de ce revenu exceptionnel dépasse la moyenne des revenus nets d’après lesquels ce contribuable a été soumis à l’impôt sur le revenu au titre des trois dernières années, l’intéressé peut demander que l’impôt correspondant soit calculé en ajoutant le quart du revenu exceptionnel net à son revenu net global imposable et en multipliant par quatre la cotisation supplémentaire ainsi obtenue (…) »

 

Le système du quotient permet d’éviter que la progressivité de l’impôt n’aboutisse à soumettre à une imposition excessive les revenus exceptionnels et ceux dont la perception est différée. Il consiste à calculer l’impôt correspondant au revenu exceptionnel ou différé en divisant le montant de ce revenu par un certain coefficient, en ajoutant au revenu net global « courant » le chiffre résultant de cette division, puis en multipliant par le même coefficient la cotisation supplémentaire ainsi obtenue.

 

En l’espèce, le 12 janvier 2006, Mme D a reçu de son père, par voie de donation à titre gratuit, 3 740 actions de la SAS Cérès. Les 15 juin 2006 et 19 septembre 2008, cette société a racheté à Mme D respectivement 1 520 et 1 555 de ses actions.

 

Si aucune plus-value n’a été réalisée en 2006, la valeur unitaire de rachat des parts ayant été fixée à celle de 535 euros retenue à l’occasion de la donation, l’opération intervenue en 2008 est, en revanche, à l’origine d’une plus-value de 567 575 euros, les parts ayant été rachetées au prix unitaire de 900 euros.

 

Estimant que le gain ainsi réalisé constituait un revenu exceptionnel, Mme D a opté pour son imposition selon le système du quotient.

 

Pour juger que le gain litigieux né du rachat, en 2008, de ses propres actions par la SAS Cérès ne présentait pas un caractère exceptionnel au sens de l’article 163-0 A du CGI, la cour administrative d’appel de Marseille a relevé :

 

  d’une part, qu’à la suite des rachats d’actions réalisés en 2006 et 2008, Mme D disposait encore de 665 actions, et

 

  d’autre part, qu’il n’était fait état d’aucun élément particulier de nature à s’opposer à une nouvelle opération de rachat, par la SAS Cérès, du reliquat de parts restant entre les mains de Mme D.

 

Ainsi, elle a considéré que l’opération réalisée en 2008 par la contribuable, parce qu’elle pouvait être amenée à se reproduire, devait être regardée comme susceptible d’être recueillie annuellement.

 

Le Conseil d’État juge qu’en statuant ainsi, alors qu’il ne ressortait pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l’opération de rachat des titres aurait eu vocation à se renouveler régulièrement les années suivantes quand bien même la contribuable avait conservé après 2008 une partie de ses actions, la cour a inexactement qualifié les faits qui lui était soumis.

 

Par suite, Mme D est fondée à demander l’annulation de l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Marseille le 6 décembre 2018.

 

Le Conseil d’État règle l’affaire au fond et juge que la plus-value réalisée en 2008 par Mme D constitue un revenu qui, par sa nature, n’était pas susceptible d’être recueilli annuellement. Le respect de l’autre condition nécessaire pour bénéficier du système du quotient, tenant au montant, n’étant pas contesté, Mme D est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2008.

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