SOURCE : Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, n°19-20.920, F-D
Un salarié s’est vu notifier sa mise à pied à titre conservatoire le 8 septembre 2015.
Par courrier en date du 14 septembre 2015, le salarié contestait la mise à pied verbale prononcée par l’employeur.
Le lendemain le salarié sera convoqué à un entretien préalable, pour finalement être licencié pour faute grave le 29 septembre 2015, l’employeur lui reprochant des erreurs de fabrication, une absence non autorisée et ses propos à l’encontre de la direction.
Le salarié saisira le conseil de prud’hommes prétendant qu’il avait fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire, de sorte que les faits visés dans la lettre de licenciement avaient déjà été sanctionnés, en conséquence son licenciement était sans cause réelle et sérieuse.
Il est de jurisprudence constante et en vertu du principe non bis in idem[1], que la mise à pied conservatoire doit être requalifiée en mise à pied disciplinaire dès lors que la procédure de licenciement n’a pas été engagée rapidement après la notification de la mesure conservatoire et si aucun motif ne permet de justifier le délai[2].
La Cour de cassation considère que l’absence de concomitance entre la mise à pied conservatoire et l’engagement de la procédure disciplinaire qui résulte de la convocation à un entretien préalable ainsi que l’absence de motif de nature à justifier ce délai, doit conduire à ce que les juges du fond caractérisent la mesure comme présentant le caractère d’une sanction disciplinaire.
En conséquence, l’employeur ayant déjà sanctionné le salarié pour les mêmes faits avait épuisé son pouvoir disciplinaire, le licenciement prononcé sera requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Cet arrêt rappelle que les juges ne sont pas tenus par la dénomination de l’employeur qui doivent rechercher si la mesure prise à l’encontre du salarié est provisoire ou disciplinaire au sens de l’article L. 1331-1 du code du travail.
Il conviendra d’être particulièrement vigilant donc quant au délai entre la notification de la mise à pied conservatoire et la convocation à l’entretien préalable lorsqu’aucune investigation ou enquête n’est nécessaire.
[1] Nul ne peut être sanctionné deux fois pour le même fait fautif
[2] Cass. soc., 17 octobre 2018, n° 16-28.773 – Cass. soc., 15 mai 2019, n° 18-11.669 – Cass. soc., 30 septembre 2020, n° 18-25.565