Source : Cass. Com., 20 avril 2017, pourvoi n° 15-18.598 F-P+B+I.
La déclaration de créances est une demande en justice. Cette solution, dégagée par la jurisprudence de longue date, sert essentiellement aux débiteurs en procédure collective à contester les déclarations de créance, dans le cadre d’un contentieux pléthorique. L’idée est simple, et donne des résultats parfois miraculeux (pour le débiteur !) : comme il s’agit d’une demande en justice, elle doit donc être formée par une personne habilitée à engager la personne morale, c’est-à-dire soit l’un de ses représentants légaux, ou une personne disposant d’un pouvoir. A défaut, la créance est rejetée.
La déclaration de créance, demande en justice, est désormais à ce point ancrée dans les habitudes des juges commissaires, que ces derniers extrapolent cette solution pour en tirer des conséquences inattendues, toujours dans le cadre de la vérification du passif.
C’est l’objet de l’arrêt ici commenté.
Un juge commissaire constate à son audience le défaut de comparution du créancier contesté, bien que ce dernier ait dûment répondu à la lettre de contestation du mandataire judiciaire. Il en tire une conséquence, fondée sur l’article 468 du Code de Procédure Civile : la caducité de l’instance. La décision est confirmée à hauteur d’appel, puis le créancier introduit un pourvoi.
La Cour de cassation casse l’arrêt, entérinant le principe selon lequel la vérification du passif n’est pas une instance comme les autres.
La Cour s’attache en effet à rappeler que le débiteur n’a pas d’autre diligence à accomplir que de déclarer sa créance. Le reste de la procédure échappe à son contrôle :
– Le mandataire procède à la vérification selon le calendrier qu’il détermine, voire n’y procède pas, en cas de dossier impécunieux sur autorisation du juge commissaire ;
– Ce même mandataire établit une liste des créanciers contestés, à convoquer ;
– Le procédure est orale devant le juge commissaire, dont la compétence est également particulière, en fonction de la complexité des arguments de contestation ou d’admission, mais également en fonction de l’existence éventuelle d’une instance déjà en cours.
Certes, le juge-commissaire est une juridiction à part entière. Certes, les principes directeurs du procès-civil doivent trouver à s’appliquer (intérêt et qualité à agir, respect du contradictoire, droit de recours, etc.). Mais le parallèle n’est pas complet.
La Cour de Cassation avait d’ailleurs déjà entériné la particularité de cette instance en refusant l’application de la péremption d’instance[1].
La Cour rappelle donc ici opportunément que le créancier n’est pas un « demandeur » comme les autres.
Etienne CHARBONNEL
Vivaldi-Avocats
[1] Cass. Com. 7 juillet 2009, n°07-14.455