SOURCE : 3ème civ, 5 mai 2014, QPC, n°14-40013 Publié au Bulletin
La loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009 a ouvert au justiciable la possibilité de saisir le Conseil constitutionnel lorsqu’il lui paraît, à l’occasion d’un procès devant une juridiction administrative ou judiciaire, qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit. L’entrée en vigueur de la loi (1er mars 2010) a permis un développement important du nombre de QPC, remettant en question certaines dispositions légales[1].
La transmission d’une QPC au Conseil Constitutionnel, dans les 3 mois du dépôt de la demande[2], suppose la réunion de plusieurs conditions[3] :
1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ;
2° Elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ;
3° La question est nouvelle ou présente un caractère sérieux.
Ce dernier critère suppose toutefois que la question soit précise, ce qui n’est pas le cas d’une QPC relative à la constitutionnalité, au regard des articles 4 et 17 de la constitution (liberté contractuelle, libre concurrence et droit de propriété), des « dispositions des articles L145-1 et suivants du Code de commerce, prévoyant le statut des baux commerciaux, l’indemnité d’éviction et la durée du bail ».
Ainsi mise dans l’impossibilité d’exercer son contrôle sur l’applicabilité au litige des dispositions critiquées et sur le caractère sérieux de la question, la Cour de cassation a refusé de renvoyer la QPC au Conseil Constitutionnel.
Nous relèverons toutefois que le statut des baux commerciaux ne semble pas, à l’heure actuelle, contenir de dispositions inconstitutionnelles, toutes les questions transmises en cette matière ne donnant pas lieu à renvoi. Ainsi :
Les délais de grâce prévus à l’article L145-41 du Code de commerce, qui sont entourés de garanties procédurales et fond suffisantes, répondent à un motif d’intérêt général, de sorte qu’ils ne portent pas atteinte au droit au maintien de l’économie des conventions légalement conclues (art 4 et 16 DDHC)[4] ;
L’article 1722 du Code civil, applicable au droit des baux commerciaux, qui, prévoit une résiliation de plein droit du bail en cas de destruction de l’immeuble, n’est que la conséquence de la disparition de l’objet de la convention, de sorte qu’il n’est pas contraire au principe du respect de la propriété privée (art 2 et 17 DDHC)[5] ;
L’article L145-34 du code de commerce, relatif aux règles du plafonnement, n’est pas contraire au principe de libre concurrence et de liberté contractuelle, ni au droit de propriété (art 4 et 17 DDHC), puisqu’il n’est pas d’ordre public, et qu’il permet néanmoins une hausse du loyer contractuellement fixé[6] ;
L’article L145-1 I du code de commerce n’est pas contraire au principe de liberté d’entreprendre puisque le statut n’exclut pas de ses bénéficiaires les preneur à bail de locaux non clos ni couvert, sous réserve que l’emplacement concédé soit stable et permanent[7]
Sylvain VERBRUGGHE
Vivaldi-Avocats
[1] Cf article Vivaldi chronos du 3 juin 2014
[2] Article 23-4 de la LO n°2009-1523 du 10 décembre 2009
[3] Article 23-5 de la LO n°2009-1523 préc.
[4] Ass Plen, 18 juin 2010, n°09-71209, Publié au bulletin
[5] 3ème civ, 4 janvier 2011, n°10-19975, Inédit
[6] 3ème civ, 13 juillet 2011, n°11-11072, Publié au bulletin et 3ème civ, 28 septembre 2011, n°11-13879
[7] 3ème civ, 20 mars 2014, n°13-24439, Publié au bulletin, et notre article du 27 mai 2014