Cass. soc. 18-1-2023 n° 21-19.349 F-B, G. c/ Caisse nationale des barreaux français
Par cet arrêt, la Cour de cassation précise sa jurisprudence exigeant de l’employeur qu’il informe par écrit le salarié adhérant au contrat de sécurisation professionnelle (CSP) sur la cause économique de la rupture.
Pour rappel, le salarié qui adhère au contrat de sécurisation professionnelle doit être informé par écrit du motif économique de la rupture du contrat de travail avant d’adhérer au dispositif, donc au plus tard avant l’envoi à l’employeur du bulletin d’acceptation.
D’où l’importance de fixer la date à laquelle le salarié a adhéré au CSP.
Les conditions et modalités d’application du CSP sont fixées par le Code du travail et la convention UNEDIC du 26 janvier 2015.
L’adhésion du salarié au CSP emporte rupture du contrat de travail.
Cette rupture doit avoir une cause économique réelle et sérieuse.
L’appréciation de cette cause ne peut résulter que des motifs énoncés par l’employeur dans un document écrit[1]
Trois conditions sont exigées de l’employeur pour cet écrit :
– le motif économique de la rupture doit être indiqué dans le document d’information sur le CSP remis obligatoirement au salarié ou dans la lettre de licenciement à titre conservatoire que l’employeur peut être tenu de lui adresser [2]ou dans tout autre document justifiant du motif économique, par exemple un e-mail incluant le compte-rendu de la réunion avec le CSE sur le licenciement économique envisagé et énonçant les difficultés financières et les postes supprimés, dont celui du salarié[3], ou une lettre remise au salarié dans le cadre de l’obligation préalable de reclassement de l’employeur, énonçant le motif de la suppression du poste et en proposant un nouveau [4]
– il doit être remis personnellement au salarié [5]
– enfin, cet écrit doit être porté à la connaissance du salarié au plus tard au moment de l’acceptation du dispositif.[6]
C’est sur ce dernier point, relatif à la date de l’acceptation du CSP par le salarié, que portait en l’espèce le litige soumis à la Cour de cassation.
La salariée avait été convoquée à un entretien préalable à son licenciement économique, qui s’est déroulé le 29 octobre. Au cours de l’entretien, l’employeur a exposé oralement le motif économique justifiant la rupture, et lui a proposé un CSP. Il lui a remis le dossier d’information sur le dispositif, la salariée disposant d’un délai de réflexion de 21 jours.
La salariée a adhéré au dispositif le 6 novembre suivant, en adressant à l’employeur son bulletin d’acceptation. Par retour de courrier, l’employeur lui a notifié les motifs économiques de la rupture. Contestant ceux-ci, la salariée a saisi le juge prud’homal en lui demandant de constater l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement.
La Cour d’appel de Paris a rejeté la demande. Selon elle, l’information relative au motif économique de la rupture a été donnée à la salariée tant lors de l’entretien préalable que dans la lettre de licenciement notifiée le 9 novembre. Or la cour d’appel a retenu que « l’adhésion complète au CSP » était intervenue le 18 novembre, c’est-à-dire après réception de la lettre de licenciement.
La Cour de cassation censure la décision des juges du fond pour violation de la loi et de la convention UNEDIC régissant le CSP.
Pour elle, la salariée avait adhéré au CSP dès le 6 novembre en adressant à son employeur le bulletin d’acceptation. Or, à cette date, l’employeur ne lui avait pas remis ou adressé personnellement un document écrit énonçant le motif économique de la rupture. La cour d’appel aurait donc dû en déduire que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le salarié manifeste sa volonté de bénéficier du CSP en remettant à son employeur le bulletin d’acceptation. Et c’est cette adhésion qui emporte rupture du contrat de travail. Si, à cette date, le salarié n’a pas connaissance du motif économique du licenciement, il ne peut pas adhérer au CSP en connaissance de cause.
[1] Cass. soc. 27-5-2009 n° 08-43.137 ; Cass. soc. 2-12-2009 n° 08-44.656
[2] Cass. soc. 17-3-2015 n° 13-26.941
[3] Cass. soc. 13-6-2018 n° 16-17.865
[4] Cass. soc. 16-11-2016 n° 15-12.293
[5] Cass. soc. 23-11-2022 n° 21-17.483
[6] Cass. soc. 16-11-2016 n° 15-12.293 ; Cass. soc. 27-5-2020 n° 18-20.153, 18-24.531 et 18-20.142