SOURCE : Conseil d’Etat, 17 octobre 2014, Commune de Jouars-Pontchartrain, req. n°360968
Depuis l’abandon de la théorie du propriétaire apparent marqué par l’arrêt Quenesson (Conseil d’Etat, 15 février 2012, n°333631), il n’incombe plus à l’Administration de vérifier le titre de propriété ou celui habilitant le pétitionnaire à construire sur le terrain, du moment que le pétitionnaire « atteste remplir les conditions définies à l’article R. 423-1 du code de l’urbanisme ».
Si l’autorité administrative compétente vérifie la conformité du projet aux règles et servitudes d’urbanisme, elle ne vérifie pas si le projet respecte les règles de droit privé, et notamment celles relatives au droit de propriété.
Le permis de construire étant ainsi « délivré sous réserve du droit des tiers », il reviendra à ceux-ci de faire valoir, le cas échéant, leurs éventuels droits lésés devant le juge judiciaire, dans le cadre d’un litige totalement distinct de celui dont le juge administratif a à connaître s’agissant de la délivrance de l’autorisation d’urbanisme.
Ainsi, sous réserve de la fraude, « le pétitionnaire qui fournit l’attestation prévue à l’article R. 431-5 du code de l’urbanisme selon laquelle il remplit les conditions fixées par l’article R. 423-1 du même code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande ».
En application de cette interprétation stricte de l’article R. 423-1 du code de l’urbanisme, le Conseil d’Etat considère dans son arrêt du 17 octobre 2014, qu’ « une demande d’autorisation d’urbanisme concernant un terrain en indivision peut être régulièrement présentée par un seul co-indivisaire, alors même que les travaux en cause pourraient être contestés par les autres propriétaires devant le juge judiciaire ; qu’il appartient au seul juge judiciaire, le cas échéant, de se prononcer sur le bien-fondé d’une telle contestation, qui ne peut en tout état de cause, caractériser par elle-même, une fraude du pétitionnaire ».
En l’espèce, le maire de la commune de Jouars-Pontchartrain s’était opposé à la déclaration préalable de M.A qui portait sur l’édification d’un portail coulissant, d’un portillon et d’une clôture, au motif que le rail permettant le coulissement du portail était implanté sur un passage en indivision et qu’il avait reçu des courriers de propriétaires co-indivisaires dénonçant la réalisation des travaux sans leur accord.
Aussi, c’est à bon droit que la Cour administrative d’appel de Versailles avait jugé la décision du maire illégale, l’existence d’une contestation des propriétaires co-indivisaires ne pouvant légalement justifier la décision d’opposition du maire à la déclaration de travaux, et ce alors même que ce dernier avait été saisi de courriers de contestation des intéressés.
Stéphanie TRAN
Vivaldi-Avocats