L’arrêt de la commercialisation du produit pour lequel une marque a été enregistrée n’entraine pas la déchéance automatique de celle-ci

Virginie PERDRIEUX
Virginie PERDRIEUX

  

SOURCE : Cour d’appel de Paris, pôle 5, 1re ch., 14 avril 2015, « Association Les Amis de Delage c/ Denty SAS », RG 2013/19644, M20150148

  

L’association Les Amis de Delage a été fondée en 1956, pour entretenir le souvenir des véhicules créés par Louis Delage jusqu’en 1955, et veiller à la pérennité de la marque française « Delage », déposée en 1985 pour désigner en classe 12 les « véhicules, appareils de locomotive par terre, par air et par eau », dont elle est titulaire.

 

La société Denty, distribuant des sacs à mains de luxe sous le logo original « Delage », a fait assigner cette association devant le Tribunal de grande instance de Paris aux fins de déchéance de sa marque pour non-usage sérieux pendant une période ininterrompue de 5 ans pour les produits de la classe 12.

 

En première instance, le Tribunal de grande instance de Paris a estimé que la déchéance de la marque était acquise, dès lors que l’association ne prouvait pas avoir produit, fait produire, et/ou vendu des prototypes Delage, des véhicules reconstruits Delage ou encore des pièces détachées.

 

La Cour d’appel en a décidé autrement par un attendu de principe fort éclairant, dont les termes sont les suivants :

 

« Considérant que l’usage sérieux suppose une exploitation du signe qui correspond à la fonction de la marque qui est de garantir au consommateur concerné l’identité d’un produit en lui permettant de distinguer sans confusion possible ceux qui ont une autre provenance, mais cet usage doit être apprécié concrètement en tenant compte notamment des caractéristiques des produits en cause et de la structure du marché concerné, la seule circonstance que les produits pour lesquels la marque a été enregistrée ne soient plus présents sur le marché (s’agissant en particulier de véhicules d’époque déjà construits ou commercialisés) ne pouvant exclure un usage sérieux de la marque ».

 

Faisant application de ce principe, la Cour, pour débouter la société Denty de sa demande de déchéance, constate, dans un premier temps, que le signe litigieux ne pouvait être utilisé que sur me marché de collectionneurs, la création et la fabrication des véhicules Delage ayant cessé depuis 30 ans lors du dépôt de la marque et, dans un second temps, qu’il ne saurait être contesté que l’association utilise de façon sérieuse la marque « Delage », dès lors qu’elle contribue par son action à en conserver les éléments distinctifs (logo ovale) pour des véhicules ou des éléments nécessaires à leur utilisation ou locomotion.

 

Il n’est donc pas nécessaire que les produits visés au dépôt fassent l’objet d’une commercialisation pour que l’usage sérieux d’une marque soit constaté et que sa validité perdure.

 

Virginie PERDRIEUX

Vivaldi-Avocats

 

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