Indivision : le commandement de payer est un acte conservatoire

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

  

SOURCE : 1ère civ, 9 juillet 2014, n°13-21463, F-P+B

 

Un preneur à bail commercial reçoit la signification d’un commandement de payer délivré au nom de bailleurs indivis, dont l’un est décédé, puis est assigné par les mêmes indivisaires, dont le propriétaire défunt, par devant le Juge des référés près le Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN qui a constaté la résiliation du bail par l’effet de la clause résolutoire.

 

Le preneur a interjeté appel de l’ordonnance devant la Cour d’appel d’Aix en Provence[1], par devant laquelle est intervenu volontairement l’héritier de l’indivisaire.

 

Les actes accomplis au nom de l’indivision devant être accomplis par l’ensemble des indivisaires, et l’acte extrajudiciaire délivré au nom d’un défunt étant nul[2], se posait la question de la validité de l’acte, qui a conduit le Preneur à exciper, devant la Cour d’appel, la nullité du commandement de payer et de l’acte introductif d’instance, sur le fondement de l’article 117 du Code de procédure civile régissant les fins de non recevoir. En effet, selon lui, les deux actes, qui relèvent de la catégorie des « actes d’administration relatifs aux bien indivis », devaient, au minimum, être délivrés au nom d’un ou plusieurs « indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis », conformément aux dispositions de l’article 815-3 du Code civil.

 

Or, en l’espèce, le défunt représentait 50% des parts indivises.

 

Pour les juges du fond, la délivrance d’un commandement de payer peut être considérée comme un acte relatif à la conservation des biens indivis et non comme acte d’administration. Cet acte pouvait donc être accompli, en application de l’article 815-2 du code civil, par un seul indivisaire.

 

S’agissant de l’assignation, la Cour d’appel considère que l’intervention volontaire de l’héritier a couvert la nullité de l’acte.

 

Le Preneur s’est pourvu en cassation.

 

Bien que la difficulté relève de la matière des baux commerciaux, l’affaire fut distribuée à la Première chambre civile de la Cour de cassation, faisant ainsi logiquement prévaloir la difficulté relative à l’indivision successorale sur la résiliation du bail.

 

La Haute juridiction partage cette position, dans le prolongement de sa jurisprudence[3], pourtant distincte de celle de la 3ème Chambre[4], et considère que le commandement de payer est un acte conservatoire ne nécessitant ni l’unanimité, ni la majorité des deux tiers des parts de l’indivision. Le commandement de payer pouvait donc être délivré au nom de n’importe quel indivisaire.

 

La question de la validité de l’acte introductif d’instance n’était pas soumise à la juridiction suprême, qui aurait sans doute constaté que l’intervention de l’héritier avait couvert la nullité[5].

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats

 


[1] CA AIX en PCE, 4 octobre 2012, n°2012/699

[2] Cf pour le congé, 3ème civ, 19 mars 1997, n°95-16826

[3] 1ère civ, 17 mars 1992, n°90-14547, Publié au Bulletin

[4] 3ème civ, 30 juin 1999, n°97-21447, Publié au Bulletin.

[5] En ce sens, cf notre article 2 septembre 2014

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