ICPE : si votre concurrent ne respect pas la règlementation, assignez le en concurrence déloyale

Sylvain VERBRUGGHE
Sylvain VERBRUGGHE

 

SOURCE : Cass com., 21 janvier 2014, n°12-25443, Inédit

 

SI les entreprises sont libres de rivaliser entre elles afin de conquérir et de retenir une clientèle, cette concurrence doit être exercée avec loyauté : En droit de la concurrence, pour les tribunaux : la fin ne justifie pas les moyens.

 

Ces moyens concurrentiels jugés déloyaux peuvent être classés en 4 catégories[1] :

 

 les moyens de confusion,

 

 le dénigrement,

 

 la désorganisation interne d’une entreprise rivale

 

 la désorganisation générale du marché

 

S’agissant plus particulièrement de cette dernière catégorie, la désorganisation générale du marché se manifeste essentiellement à travers l’exercice d’une activité en violation d’une règlementation : C’est ainsi que la vente d’un livre à prix inférieur au prix fixé par une réglementation est-elle constitutive d’un
acte de concurrence déloyale[2].

 

L’affaire ici commentée est une nouvelle illustration de ce principe :

 

En l’espèce, une société bénéficiant d’une autorisation d’exploiter une ICPE (installation classée pour la protection de l’environnement), à savoir l’exploitation d’un broyeur et le stockage et la récupération de ferraille, reproche à l’un de ses concurrents d’exploiter la même activité, sans autorisation.

 

Après avoir vainement alerté les autorités administratives concernées, elle assigne son concurrent afin d’obtenir des dommages et intérêts pour concurrence déloyale.

 

Entre temps, et après une exploitation illicite pendant 2 ans, la société concurrente obtient finalement l’autorisation d’exploiter l’activité litigieuse.

 

Pour la Cour d’appel de Paris, cette exploitation a apporté une distorsion dans le jeu de la concurrence afférente au marché considéré, constitutive d’un acte de concurrence déloyal. La Cour ajoute que l’autorisation tardive de cette exploitation n’est pas de nature à exempter le concurrent de sa responsabilité.

 

Afin de condamner la société concurrente à régler une certaine somme, sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, la Cour d’appel de Paris relève traditionnellement :

 

– la faute de l”entreprise : l’exercice illégale d’une activité ;

 

– le préjudice du demandeur : un trouble commercial constitué par un détournement de la clientèle existante ou potentielle du demandeur au profit du concurrent, chiffré selon :

 

 La nature du marché considéré ;

 

 De la marge brute habituellement générée par l’activité concernée ;

 

La durée d’exploitation illicite.

 

– Un lien de causalité : Pour la Cour d’appel de Paris, le défaut, par la société intimée, du respect de la réglementation administrative relative à l’activité commerciale de broyage constitue, pour la société appelante, un acte de concurrence illicite et déloyale, générateur, en lui-même, d’un trouble commercial
impliquant l’existence d’un préjudice.

 

La Cour de cassation partage cette position et rejette le pourvoi.

 

Sylvain VERBRUGGHE

Vivaldi-Avocats


 

[1] Roubier P., Le droit de la propriété industrielle, t. I, éd. Sirey, 1952, n°110

[2] Cass.com, 1er avril 1997, n°94-22129

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